Le sujet de l'immigration est l'un des sujets les plus sensibles - en France comme ailleurs - depuis... toujours, ou presque. Les slogans anti-immigration ("la France aux français" / "On est chez nous" / "Préférence nationale" / "Abolition du droit du sol" / Stopper la submersion" comme à Poitiers en 732 etc.) représentent l'un des principaux marqueurs de l’extrême droite, avec de plus en plus de succès dans les urnes.
Une vidéo pour mieux comprendre :
Lorsqu'on cherche à comprendre, il n'est pas accessoire de savoir d'où l'on parle, càd quel est le moteur idéologique sous-jacent. Dans le paradigme naturaliste scientifique (matérialiste), les opinions, choix et actions humaines ne peuvent pas être analysés en termes de volonté libre (libre arbitre) mais de déterminations diverses qu'il nous faut cerner si l'on souhaite modifier quoi que ce soit.
Dans le cadre d'une certaine "dérive" droitière constatée un peu partout, affirmer que c'est le libre arbitre des populations concernées qui se serait modifié interdit toute possibilité de comprendre et d'agir puisqu'il n'existe aucun levier pour modifier un libre arbitre ontologique... qui n'existe pas. Quelle serait d'ailleurs la "liberté" d'une volonté qui changerait en fonction de nouveaux déterminants ? Les travaux en sociologie politique ne font - à raison - aucune place au libre arbitre, individuel comme collectif.
Reste donc à examiner de près les déterminants psychologiques, sociaux, économiques, politiques...autant qu'on puisse les mettre à jour comme par exemple dans cette vidéo : "Pourquoi l'extrême droite gagne en Europe".
Par exemple, l'immigration - réelle ou "ressentie" comme on le dit maintenant depuis l'apport conceptuel météorologique - semble constituer un déterminant ancestral majeur . Les étrangers viennent manger le pain des français (allemands, suédois, américains etc.) alors qu'ils ont contribué à l'effort de guerre à certaines époques, à la reconstruction du pays, présentant l'opportunité d'une main d'oeuvre bon marché du côté des mines de charbon, de Renault, Peugeot etc. Les négros, bougnouls, ritals, bicots, polacks et autres portos ont bien souffert de discriminations ordinaires mais, avec le temps, se sont assimilés pour la plupart, devenant de "bons" français.
Et le sujet est des plus complexes si l'on tient compte des dernières données de l'Insee* :
Les nouvelles vagues font face à la même discrimination mais il est toujours surprenant de voir que ce sont dans les petites communes de la "France périphérique" que ce rejet de l'immigration semble le plus fort ; alors que des immigrés, il n'y en a point (ou très peu) dans ces communes !
Au passage, en 2022 :
Face à un tel paradoxe, certains se sont dit qu'il faudrait envisager d'autres déterminants à ce rejet.
Le plus évident serait que l'on craint ce que l'on ne connaît pas, une peur de l'inconnu ancrée dans notre système nerveux comme mécanisme de survie dans le cadre de l'évolution. Encourager la curiosité, la flexibilité cognitive et l'ouverture d'esprit permettrait de mieux appréhender l'inconnu et de diminuer les réactions anxieuses ou craintives qui y sont associées. Vaste programme bien difficile à mettre en oeuvre dans l'état actuel de notre structure éducative !
Autre piste : des chercheurs** ont analysé les évolutions démographiques locales au sein de 28 pays européens et montré que le solde migratoire était négatif dans un grand nombre de municipalités - près du quart d’entre elles en France -, souvent rurales et phagocytées par les centres urbains. Le croisement de ces données avec les résultats aux élections nationales des années 2010 a révélé que plus une région se dépeuple, plus elle tend à voter à l’extrême droite.
D’une part, les populations qui partent, plus jeunes et plus diplômées, votent majoritairement à gauche, d’où une augmentation des tendances droitières dans les régions de départ.
D'autre part, la perte de population active contribue à un déclin économique et un sentiment de déclassement avec des services publics qui se détériorent, des petites entreprises qui font faillite, l’épicerie, le café du quartier qui ferment, comme la petite école du coin (plus assez d'enfants), la maternité qui se retrouve à 60 km de chez soi, le désert médical qui s'étend, la poste et la banque à 5 km... Tout ceci en raison à la fois de la diminution des effectifs locaux et de la diminution de l’assiette fiscale qui en résulte. Soit une qualité de vie en berne, un ressentiment profond contre les pouvoirs en place et une sorte de "dépression collective" selon certains maires.
Si bien qu’en reprenant ces thématiques de la lutte contre l’immigration, les partis plus à gauche risquent de s’enfermer dans un cercle vicieux : de façon assez ironique, les problèmes qui ont renforcé l’attrait pour l’idéologie anti-immigration de l’extrême droite (baisse du taux de natalité des françaises avec risque du "grand remplacement", services publics en panne, pénurie de main-d’œuvre, manque de nouvelles entreprises et de nouveaux services...) pourraient être résolus par… l’immigration ! Pour l'auteur de l'étude citée et ses collègues, mieux vaudrait alors s’attaquer à ce problème de déclassement local comme dans l’exemple suédois où a été mis en place un système de soutien aux petits commerces dans les zones vulnérables. Par ailleurs, en 2021, l’Espagne a annoncé un plan de 11,9 milliards de dollars visant à remédier au manque de connectivité téléphonique 5G et de villes technologiquement intelligentes dans les zones rurales. Parallèlement, le Fonds européen agricole pour le développement rural consacre plus de 100 milliards de dollars aux efforts visant à soutenir les zones rurales dans son budget 2021-2027.
Enfin, une immigration à "petite dose" localement et non rassembler dans des ghettos (ne pas réveiller le spectre de l'insécurité !) pourrait peut-être contribuer à régler nombre de difficultés, à la condition d'une vigilance et d'une assistance à l'intégration, et permettre généralement une assimilation ultérieure.
La "remigration" a historiquement signifié le
retour volontaire. Mais des groupes
d'extrême droite (dont l’AfD en Allemagne avec 20,8 % de partisans aux élections
du 23 février 2025) utilisent ce terme concernant le retour forcé des non-Européens ethniques, y compris des citoyens d’origine étrangère.
Ce concept de « remigration » a été largement critiqué
pour son caractère xénophobe et raciste, les opposants dénonçant une stratégie brutale
d'expulsions (déportations ?) forcées, en violation du droit international
humanitaire.
"Nous ramènerons les étrangers dans leur pays. Des millions de fois. Ce n'est pas un plan secret. C'est une promesse. Pour plus de sécurité. Pour plus de justice. Pour préserver notre identité. Pour l'Allemagne", a déclaré le député AfD René Springer sur X.
D’ailleurs, les (faux) billets d’expulsion sont prêts ! Belle opération de marketing !
Mais l'AfD n'est pas le seul parti politique concerné. En France, en Italie, au Royaume-Uni ou aux Pays-Bas, des figures politiques d'extrême droite ont repris cette idée adaptant le discours à leurs contextes nationaux. L'un des derniers exemples en date remonte au mois d'avril 2024, lorsque le Parlement britannique a approuvé un projet de loi permettant l'expulsion vers le Rwanda de demandeurs d'asile entrés illégalement dans le pays. Une décision qui n'a finalement pas été appliquée.
Pour tout dire, je pense que ces bienfaiteurs de l’humanité
jouent petit bras.Il suffit de faire passer à toute la population des tests
génétiques afin de connaître précisément les origines des uns et des autres.
Par exemple, le fils allemand (né en Allemagne) d’un père présentant 5 % de gènes africains, 36 % de gènes turcs et une majorité de gènes japonais devrait être exilé au Japon. Simple, mathématique, scientifique, imparable. Et sa femme - avec 51 % de gènes aryens - peut rester en Allemagne. Quand aux enfants : faut voir. Reste à savoir si les « pays d’origine » accepteront ces dispositions. Mais ce n’est qu’un « détail » de l’Histoire.
Certes, les pisse-froids gauchistes diront que l'identité d'une personne ne se résume pas à sa génétique. La culture, l'histoire personnelle, les liens sociaux et les expériences de vie jouent un rôle crucial. Exiler quelqu'un en fonction de ses gènes ne tient pas compte de ces aspects essentiels de l'identité humaine.
Finalement, comme l'écrivait fort justement BaudRim, une seule boussole : "L'autre est un je".
* https://www.insee.fr/fr/statistiques/3633212
** Dancygier et al., Emigration nd radical right populism, American Journal of Political Science, le 27 mars 202 - https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/ajps.12852 et R. Dancygier et D. Laitin, Emigration : The hidden catalyst behind the rise of the radical right in Europe’s depopulating regions, The Conversation, le 10 juin 2024 - https://theconversation.com/emigration-the-hidden-catalyst-behind-the-rise-of-the-radical-right-in-europes-depopulating-regions-231234