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Libre arbitre : KEZAKO ?

Le libre arbitre (LA) - ou liberté de la volonté - est un concept central de notre société présent aussi bien dans notre vision de nos propres comportements que ceux des autres, au cœur de notre justice, notre économie, notre politique... Bref, partout.

Comme l’écrivait en 1885 le philosophe Charles Renouvier dans ses réflexions sur le Libre Arbitre et le déterminisme :

« Le nombre de conceptions réellement différentes en philosophie, est beaucoup plus petit qu’on ne paraît généralement s’en apercevoir. Le nombre de questions contradictoirement débattues depuis vingt-quatre siècles, j’entends de celles dont la solution est d’une importance capitale pour l’homme et autour desquelles toutes les autres gravitent, est lui-même très petit. »

L’existence ou non d’un Libre Arbitre « réel » fait partie de ces quelques questions fondamentales, probablement l’une des plus exigeantes.

La meilleure définition de ce LA me semble être celle du biologiste Anthony Cashmore[1] :

« Le libre-arbitre est la croyance selon laquelle il existe une partie du comportement biologique qui est la conséquence de quelque chose d’autre que les inévitables influences de l’histoire génétique et environnementale d’un individu, et des possibles lois stochastiques[2] de la nature. »

Autre définition du Libre Arbitre : il y aurait chez l’Humain une partie « biologique » qui dépendrait de très nombreux déterminants génétiques en interaction avec l’environnement, auxquels s’ajouterait « quelque chose » d’autre, de nature "surnaturelle" , la liberté de la volonté ou Libre Arbitre.

Ou encore : le Libre Arbitre est le pouvoir indéterminé de se déterminer soi-même, soit un jeté de dés que l’on ne peut contrôler mais qui permettrait de se contrôler (?)

Une autre définition du neuroscientifique Read Montague au CV impressionnant[3] :


« Le libre arbitre est l’idée selon laquelle nous faisons des choix et avons des pensées indépendantes de tout ce qui ressemble de loin à un processus physique. Le libre arbitre est le cousin proche de l'idée de l'âme – le concept selon lequel « vous », vos pensées et vos sentiments, dérivez d'une entité séparée et distincte des mécanismes physiques qui composent votre corps. De ce point de vue, vos choix ne sont pas causés par des événements physiques, mais émergent plutôt entièrement formés d’un endroit indescriptible et en dehors du champ des descriptions physiques. Cela implique que le libre arbitre ne peut pas avoir évolué par sélection naturelle, car cela le placerait directement dans un flux d’événements causalement connectés. »

Une dernière petite définition pour la route : le Libre Arbitre est la croyance générale que le comportement humain est libre de contraintes internes et externes, et que nous aurions donc un « contrôle intentionnel conscient » sur nos comportements et nos actes. 

Il existe bien des malentendus concernant la définition de libre arbitre. Par exemple, NeuroRights Initiative a établi récemment 5 "neurodroits" afin de protéger les humains des manipulations techniques d'ordre neurologique. Ce qui est en soit légitime. L'un de ces droits de NeuroRights Initiative est "Le droit au libre arbitre : les individus devraient avoir le contrôle ultime de leurs propres décisions, sans manipulations externes." Mais il ne s'agit pas de libre arbitre ici. Il s'agit de protéger la volonté de l'individu des manipulations externes seulement, et non des influences internes amenant à telle ou telle volonté puis volition (= acte concret par lequel la volonté se met en œuvre). NeuroRights Initiative confond ici allègrement liberté d'action (absence d'entrave) et liberté de la volonté (libre arbitre) qui intervient en amont de la liberté d'action, et qui est soumise aux contraintes internes génétiques et biologiques (tumeur frontale par ex.), souvenirs, expériences plus ou moins douloureuses etc.

Tel un arbitre de foot, le Libre Arbitre serait pour le commun des mortels à la fois le témoin d’une scène et celui qui dispose de l’autorité pour faire appliquer ses décisions / jugements. Il se veut dans le même temps distinct des joueurs - les déterminants des lois naturelles - et au-dessus d’eux. Avec une caractéristique de plus que l'arbitre de foot : c'est lui - libre arbitre - qui déciderait des comportements tactiques et stratégiques des joueurs (dribble, passe, tir, tacle, contrôle, roulette, petit pont, bicyclette, feinte...). Ce qui implique la notion de responsabilité, morale[4] et de culpabilité chez l'humain (l'animal ne serait pas concerné...?) puisque le Libre Arbitre n’ayant aucune contrainte interne ou externe devrait permettre de « faire autrement », en préférant le bon dribble plutôt que le mauvais... et surtout le Bien plutôt que le Mal ! 

Autrement dit, placé « strictement » dans les mêmes conditions déterminantes, je peux choisir blanc ou noir, bien ou mal, selon le « bon vouloir » de mon Libre Arbitre. Petite expérience de pensée : si je me trouve strictement dans la même situation une seconde fois - ce qui est proprement impossible à expérimenter -, vais-je prendre la même décision ? Le matérialiste / déterministe / naturaliste dira que oui, bien évidemment : les mêmes conditions strictes donneraient la même décision. Le croyant au Libre Arbitre dira que non, pas nécessairement, que l'on pourrait faire autrement en partant des mêmes conditions externes comme internes ; et d’ailleurs, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ! 

Mais là, problème de taille : si un individu change d’avis alors que les déterminants sont strictement identiques dans deux situations à un jour d’intervalle, c’est donc que son Libre Arbitre aurait changé entre temps ? Selon quelles modalités ? Modification du LA en qualité, en quantité, les deux ? Car on ne peut pas faire jouer, dans ce nouvel avis modifié, cette nouvelle décision, un quelconque indéterminisme quantique qui détruirait ipso facto la notion de Libre Arbitre ! Ne serait-ce pas plutôt un déterminant nouveau qui se serait glissé entre temps (réflexion qui est tout autant déterminée que le reste de l'univers / nuit qui « porte conseil » / avis extérieur...). Le cerveau "travaille" en permanence, que l'on en soit conscient ou pas. Et les capacités de délibération consciente, de pensée rationnelle et de maîtrise de soi ne sont pas des entités magiques mais des interactions neuronales avec l’environnement. 

Petite question : les sacrifices humains ont été pratiqués dans de nombreuses cultures à travers l’Histoire (Egypte et Chine anciennes, certaines cultures africaines, Aztèques et Incas...), souvent dans le but de plaire ou d’apaiser les dieux, de garantir la prospérité ou de marquer des événements importants. Ce qui semble barbare ou irrationnel aujourd’hui était souvent perçu comme nécessaire et "sacré" à l’époque. Sans se risquer à des jugements des plus anachroniques, il est clair que leur "libre arbitre" était "différent" du nôtre pour trouver normal et bien ce qui nous apparaît actuellement comme des horreurs. Les valeurs n'étaient pas les mêmes ? Mais alors, ce sont notamment les valeurs du moment, fluctuantes au cours de l'Histoire, qui déterminent les actions et non pas un pseudo libre arbitre à géométrie variable, s'il existait ?

Par ailleurs, ce libre arbitre, s'il existait, devrait être conscient... alors que les expériences sur les prises de décisions montrent un décalage très important entre les prémisses de décision cérébrales "prévues" à l'IRM et la décision "consciente" comme le montrent ces expériences :

Nombreuses sont les études montrant que nos choix ressentis comme libres ne le sont pas. Les gens savent-ils quand ils ont fait un choix conscient ? Par exemple, une étude montre que, sans  que  les  participants  en  soient  conscients,  un  événement  apparemment  ultérieur  a  influencé  des  choix  qui  étaient  vécus  comme  se  produisant  à  un  moment  antérieur.  Ces  résultats  suggèrent  que,  comme  certaines  expériences  perceptuelles  de  bas   niveau,  l’expérience  du  choix  est  susceptible  d’être  influencée  par  une  influence  « postdictive »  et  que  les  personnes  peuvent  systématiquement  surestimer  le  rôle  que  joue  la  conscience  dans  leur  comportement  choisi (Illusion du choix libre conscient). L'auteur de l'étude précise :

« Peut-être qu'au moment même où nous faisons l'expérience d'un choix, notre esprit réécrit l'histoire, nous faisant croire que ce choix, qui a en fait été effectué après que ses conséquences ont été perçues inconsciemment, était un choix que nous avions fait depuis le début »

Au fait : avant d'agir, il nous faut former généralement une intention qui elle-même fait suite à une idée (on évacue ici les actions "réflexes"). Chaque humain élabore chaque jour des milliers d'idées, bonnes ou mauvaises, petites ou grandes (parfois), qui aboutiront à une action ou non. D'où proviennent ces idées ? D'un monde transcendant (Platon) constitué de milliards de milliards d'idées qui seraient distribuées ici ou là - une seule à la fois - chez tel humain plutôt que tel autre, au hasard ? Qui peut croire à une telle ineptie du point de vue scientifique ? 

Les idées naissent d’abord dans le cerveau, fruit de l’activité neuronale (pas de cerveau, pas d'idée). Le cortex préfrontal, associé à la pensée abstraite, et l’hippocampe, lié à la mémoire, jouent un rôle clé. Chaque jour, le cerveau traite des millions de stimuli sensoriels (vue, ouïe, etc.) et les combine avec des souvenirs, des émotions et des connaissances plus ou moins assurées. Les neurosciences montrent que les connexions synaptiques se modifient constamment (plasticité cérébrale), permettant l’émergence de nouvelles associations d’idées. Les neurotransmetteurs comme la dopamine (liée à la curiosité et à la récompense) stimulent la créativité et la génération d’idées (mais qui peut contrôler la formation de dopamine ?). Les idées surgissent souvent de façon spontanée via le réseau par défaut (Default Mode Network), actif lorsque l’esprit "divague", par exemple lors de moments de repos ou de rêverie. Les idées ne viennent pas de nulle part : elles sont souvent des recombinaisons de ce que nous avons déjà vécu ou appris, le produit d’un mélange complexe entre biologie (activité cérébrale), expérience (mémoire, apprentissage), environnement (culture, interactions) en passant par le tamis de la non-conscience avant de rejoindre la conscience. Elles surgissent comme des étincelles, souvent imprévisibles : Eureka ! Aucune trace de libre arbitre dans tout ceci puisqu'on ne choisit pas librement ses idées.
On se dit souvent qu'on aurait dû faire ceci ou cela... mais on n'en a pas eu l'idée sur le moment... et on s'en veut, ce qui est une autre ineptie : comment se reprocher de ne pas avoir eu telle ou telle idée puisqu'on n'exerce aucun contrôle sur la survenue de nos idées !

L'idée est arrivée : qu'en faire ? Une délibération plus ou moins longue se met en place avec des considérations soupesant - lors d'une délibération sur une sorte de paperboard psychique - les plus et les moins afin de former (ou non) une intention et une action ciblant... une meilleure survie au sens très large. Cette délibération ne fait que mettre en jeu les mêmes éléments que ceux vus précédemment : génétiques, environnementaux et statistiques notamment Bayésiennes (voir ci-dessous "Le cerveau statisticien : la révolution Bayésienne en sciences cognitives" dans cette vidéo de Stanislas Dehaene).


Dans une démarche naturaliste/matérialiste, rien n'est surprenant dans ces constatations. Les merveilleuses tribulations du cerveau nous font bien souvent prendre des vessies pour des lanternes comme en témoignent notamment les"post-vérités" et les dizaines de biais cognitifs dont nous usons au quotidien... sans en prendre conscience, justement.

Mais des résultats qui ne peuvent être acceptés par un spiritualiste pour qui la volonté est nécessairement libre et consciente, et non "fabriquée" en amont par un "non conscient" quelconque. 

Sur cette question comme bien d'autres, les religieux sont vent debout contre la vision scientifique au point de remettre sur la table la dualité, voire la physique quantique qui validerait la possibilité du libre arbitre, jusqu'à des sorties du type :

"Le mystère de l'Homme est incroyablement diminué par le réductionnisme scientifique et sa prétention matérialiste à rendre compte du monde de l'esprit en termes de simple activité neuronale. Une telle croyance ne peut être considérée que comme une superstition" (Evolution du cerveau et création de la conscience - p. 322 - J.C. Eccles prix Nobel de médecine - 1992 - Fayard). 

Cet auteur passe de la conscience à l'âme, et de l'âme à Dieu. La boucle est bouclée (à propos de l'âme : Ame ?). Il est toujours réjouissant (ou consternant) de constater que les spiritualistes croyant dans un dieu qu'ils n'ont jamais pu mettre en évidence traitent les scientifiques de superstitieux ! Voici l'étendue ci-dessous du désastre intellectuel : 

Le chercheur et docteur en neuroscience Björn Brembs résume de façon nettement plus crédible :

« Aujourd’hui, le concept métaphysique de libre arbitre est largement dépourvu de tout support, empirique ou intellectuel (...) Bien sûr, tous ces neurobiologistes ont raison de dire que le libre arbitre en tant qu’entité métaphysique est très probablement une illusion. L'usage familier et historique du terme « libre arbitre » a été inextricablement lié à l'une ou l'autre variante du dualisme ».* 

Petite anecdote montrant les résistances à accepter cette idée que nous sommes des êtres biologiques gouvernés par les mêmes lois naturelles que le reste de l'univers. Lors d'une colloque mené par J.P. Changeux, une question lui est posée par la salle suite à son exposé : que fait-il donc du concept de libre arbitre dont il n'a parlé à aucun moment ? Le scientifique s'en est sorti avec quelque chose comme "il n'est pas interdit d'y croire"... Je lui ai demandé par la suite pourquoi il n'avait pas répondu plus précisément à cette question, lui qui a écrit par ailleurs dans son ouvrage « L’homme neuronal » (Fayard - 1983) :

« Pour le neurobiologiste que je suis, il est naturel de considérer que toute activité mentale, quelle qu’elle soit, réflexion ou décision, émotion ou sentiment, conscience de soi…est déterminée par l’ensemble des influx nerveux circulant dans des ensembles définis de cellules nerveuses, en réponse ou non à des signaux extérieurs. J’irai même plus loin en disant qu’elle n’est que cela. »

Il m'a répondu qu'il aurait été beaucoup trop difficile d'exposer ses idées sur le sujet, tant les présupposés profanes pro-libre arbitre étaient ancrés... Dommage.

Mais il faut savoir que les résistances spiritualistes concernant l'existence du LA sont apparemment invincibles si l'on tient compte des publications scientifiques comme celle-ci :

"Certaines recherches suggèrent que le comportement moral peut être fortement influencé par des caractéristiques triviales de l’environnement dont nous n’avons aucune idée. Des philosophes, des psychologues et des neuroscientifiques ont soutenu que ces résultats remettent en cause nos notions de bon sens d’agence et de responsabilité, qui mettent toutes deux l’accent sur le rôle du raisonnement pratique et de la délibération consciente dans l’action. Nous présentons les résultats de quatre études ... (N = 1 437) conçues pour examiner la façon dont les gens pensent aux implications métaphysiques et morales des découvertes scientifiques qui révèlent notre sensibilité à l’automatisme et aux influences situationnelles. Lorsqu’on leur présente des récits ... sur ces découvertes, les participants ne montrent aucune tendance à changer de jugement sur la liberté et la responsabilité par rapport aux groupes témoins. Cela suggère que les gens ne semblent pas disposés à adopter des attitudes sceptiques à l’égard de l’agence sur la base de ces découvertes scientifiques."***

Face à l'évidence, nous restons pourtant attachés - pauvres humains - à nos conceptions erronées. Essayez donc de convaincre un platiste que la Terre est ronde alors que des religieux Hindous, donc des "savants",  ont rapporté sa vraie structure spatiale il y a plus de 2000 ans déjà : 4 éléphants, une tortue et un serpent.


















Dan Gilbert, professeur de psychologie à Harvard avance que nous sommes dotés d’un « système immunitaire psychologique » qu’il définit comme un "système de processus cognitifs (…) qui nous permet d’altérer notre vision du monde afin de nous réconforter face aux situations que nous vivons" : un équipement de l'évolution permettant une dissonance cognitive capable de nous convaincre de n'importe quoi pour le meilleur (bonheur) comme pour le pire (les noirs valent moins que les blancs) => voir Dan Gilbert (possibilité d'obtenir les sous-titres en français en cliquant sur l'icône juste avant la roue dentée en bas à droite de l'écran)

Certains pourraient croire qu'il n'est pas bien dangereux de croire en une Terre plate portée par trois étages animaliers. Pourtant, la multiplication de "croivances" hors sol, allant dans toutes les directions (fake news, théorie du complot etc.) sous prétexte qu'il n'y aurait pas de "vérité", c'est l'assurance de conflits permanents en l'absence d'un socle social commun. 
Si tout peut être vrai, alors plus rien ne l'est.

Reste à comprendre à quoi peut bien servir cette "sensation" de volonté libre - que chacun ressent - amenant à une croyance en un libre arbitre "ontologique" dans le cade de l'évolution culturelle humaine. Plusieurs hypothèses sont avancées : la perception de la liberté de choix peut encourager une plus grande flexibilité comportementale, ce qui permet aux individus de s’adapter à des environnements changeants et de prendre des décisions qui maximisent leurs chances de survie et de reproduction. Croire en la volonté libre peut renforcer la motivation personnelle et le sens de la responsabilité. Les individus peuvent être plus enclins à entreprendre des actions positives et à éviter des comportements nuisibles s’ils se sentent maîtres de leurs décisions. Langage et communication apportent une certaine maîtrise sur notre environnement, et donc sur nos comportements. Grâce au langage, nous sommes capables d’articuler nos pensées et actions sur le long terme avec un objectif souhaité... mais ce n’est pas un « libre arbitre » pour autant.

La notion de responsabilité personnelle (à ne pas confondre avec la culpabilité) est cruciale pour le fonctionnement des sociétés humaines. Elle sous-tend les systèmes de justice et de moralité, facilitant la coopération et la cohésion sociale. Enfin, la sensation de contrôle peut réduire le stress et l’anxiété, et augmenter le bien-être. Ces avantages potentiels pourraient expliquer pourquoi cette sensation a persisté et s’est développée au cours de l’évolution humaine mais il est nullement question de supprimer cette sensation, qui est, de toute façon irrépressible à l'exception de certaines pathologies (dépression...).

Prenons une analogie : certains ont avancé que la domination de l'homme sur la femme à travers les siècles aurait pu présenter un avantage évolutif concernant la division du travail basée sur le genre. Les hommes, souvent plus grands et plus forts physiquement, étaient plus aptes à la chasse et à la protection du groupe, tandis que les femmes se concentraient sur la cueillette et les soins aux enfants. Des traits comme l'audace, la prise de risque chez les hommes pouvaient être favorisés en augmentant les chances de succès dans la compétition concernant les partenaires. Dans certaines cultures, la domination masculine pouvait assurer une transmission plus stable des ressources et des connaissances, ce qui pouvait être bénéfique pour la survie et la prospérité du groupe...
Peut-être... Mais les choses ont changé et les évolutions culturelles conjointes philosophiques, psychologiques, scientifiques, morales... font que ces "bonnes raisons" ancestrales de domination homme / femme, citoyen libre / esclave... ne sont plus défendables, sauf pour les "masculinistes" et quelques conservateurs retardataires (https://www.youtube.com/watch?v=0h2UnaD2b1g et https://shs.cairn.info/revue-bulletin-de-psychologie-2016-5-page-345?lang=fr.). 
Le combat "c'était mieux avant" est perdu d'avance mais certains s'y accrochent comme les courants d'extrême droite machistes type AfD en Allemagne qui préfèrent le bikini au burkini. Vous ne pouvez pas comprendre : c'est de l'humour allemand.

 2025

Pour en revenir à notre sujet, le libre arbitre ontologique - comme la domination homme / femme- , a pu être "utile" pour réguler une société primitive légitimant la punition physique et/ou psychique, la culpabilisation... ; mais tout cet arsenal est devenu caduque et délétère pour les mêmes raisons évolutives culturelles qui questionnent actuellement en profondeur la domination homme / femme. 
D'autant que la "croivance" persistante dans un LA métaphysique (autre que la simple sensation) conduit aux conséquences dramatiques des passions tristes : haine, vengeance, injustices, domination, mépris, punitions et guerres (voir Côté obscur du LA). 

Enfin, la société peut (doit !) être régulée d'une autre manière (voir Que faire ?).

Sur le fond, le philosophe Miguel Espinoza peut conclure très justement :

"Un autre exemple de la cohérence de la métaphysique selon laquelle la nature est un réseau compact et continu de causes multiples et variées est l'absence de liberté."**

Certains diront que ce n'est pas parce qu'on ne voit que des cygnes blancs (lois naturelles) depuis toujours qu'un cygne noir (le surnaturel, Dieu, des extraterrestres sur Mars, un libre arbitre "réel" etc.) ne peut pas exister, et que l'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence...

Certes, mais c'est juste une forme de sophisme logique connue sous le nom d'appel à l'ignorance. Ce sophisme se produit lorsque l'on affirme qu'une proposition est vraie (le libre arbitre existe) simplement parce qu'elle n'a pas été prouvée fausse. Comme on sait bien que que prouver l'inexistence de quelque chose est pratiquement impossible, c'est pain béni pour les sophistes de tout poil. Si l'on s'accroche indéfiniment à l'idée que l'absence de preuve n'est jamais une preuve de l'absence, on risque de continuer à croire en des choses sans aucun fondement empirique ou logique, même après des recherches approfondies. Cela peut entraver le progrès de la connaissance et encourager la pensée non critique.

Finalement, quel serait le statut d'un LA échappant aux lois de la nature, au déterminisme comme à l’indéterminisme ? 

Une "croivance" ?

Une entité surnaturelle ? 

Un miracle ?

Le neuroscientifique Stéphane Charpier est des plus clairs dans ce podcast
La physicienne quantique Sabine Hossenfelder fait le point dans la 1ère vidéo ci-dessousle Pr de biologie Robert Sapolsky dans la deuxième et la neuroscientifique Thalia Wheatley dans la dernière. 

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[1] « The Lucretian swerve: The biological basis of human behavior and the criminal justice system » - https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.0915161107

[2] Stochastique : traitement des données statistiques, par le calcul des probabilités

[4] Les termes d’éthique et de morale ont longtemps été synonymes. Aujourd’hui la morale renvoie à l’idée de devoir, l’éthique à l’idée de décision. La morale dicterait le devoir sans hésitation et sans exception. L’éthique, soucieuse des conséquences parfois imprévisibles d’une décision à prendre dans une situation comportant des déterminations multiples, insiste sur l’idée de choix et de responsabilité.

*"Towards a scientific concept of free will as a biological trait: spontaneous actions and decision-making in invertebrates" 

**https://www.academia.edu/105450436/La_continuit%C3%A9_causale_de_la_nature?email_work_card=view-paper

*** Commonsense morality and the bearable automaticity of being - sep. 2024

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Et pour aller plus loin, le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous

Un sacré dilemme pour la "Morale" !

Penchons-nous sur un jeu de la Théorie des jeux, discipline des mathématiques et de l'économie qui étudie les situations stratégiques et les interactions entre agents rationnels, permettant d'examiner les tensions entre coopération et trahison chez des agents rationnels : le dilemme du prisonnier

Il met en scène deux détenus soupçonnés d’un vol et emprisonnés dans des cellules séparées. Ne disposant pas de preuve, la police fait à chacun des deux le marché suivant :

"Tu as le choix entre dénoncer ton complice ou non. Si tu le dénonces et qu'il te dénonce aussi, vous aurez une remise de peine d'un an tous les deux. Si tu le dénonces et que ton complice te couvre, tu auras une remise de peine de 5 ans, mais ton complice tirera le maximum. Mais si vous vous couvrez mutuellement, vous aurez tous les deux une remise de peine de 3 ans."

N.B : Les récompenses et pénalités associées aux différentes combinaisons de stratégies peuvent varier selon les sources. Ces valeurs numériques ne représentent qu'un scénario hypothétique utilisé pour expliquer les principes fondamentaux de la théorie des jeux. L'essence du dilemme du prisonnier réside dans les incitations contradictoires des protagonistes.

Dans cette situation, il est considéré que si les deux s'entendent, ils s'en tireront globalement mieux que si l'un des deux dénonce l'autre. Mais justement, l'un des deux peut être tenté de s'en tirer encore mieux en dénonçant son complice, ce qui permet un meilleur gain dans cette configuration. Craignant cela, l'autre risque aussi de dénoncer son complice pour ne pas être le dindon de la farce. Le dilemme est donc : faut-il accepter de couvrir son complice (donc coopérer avec lui) ou le trahir ? 
Lorsque ce jeu n’est joué qu’une seule fois, le plus rentable est de trahir. Ce sont par exemple certains restaurants pour touristes, chers et mauvais, dont la préoccupation n’est pas tant de fidéliser une clientèle que de profiter au maximum de la manne des touristes qui ne font que passer. Mais tout change si le jeu comporte plusieurs sessions (= dilemme du prisonnier répété ou itéré) ; car chacun a vu comment le complice s’est comporté aux tours précédents, ce qui peut faire changer de stratégie pour un meilleur « rendement ». Pour reprendre l’exemple, on ne retourne pas dans un restaurant qui a « trahi » sur la qualité et/ou le prix !

Un concours international a confronté différentes stratégies dans le cadre de ce jeu. Résultat des courses : c’est la stratégie « Donnant donnant » (« œil pour œil » ou « Tit for Tat » en anglais) qui est l’une des plus efficaces dans le cadre du dilemme du prisonnier répété[1]. Elle consiste à coopérer au premier coup puis à systématiquement copier le comportement de son complice à la session précédente. Une variante, « œil pour œil avec pardon », s'est révélée un peu plus efficace encore : en cas de trahison de l'adversaire, on coopère parfois (de 1 à 5 %) au coup suivant. Cela permet d'éviter de rester bloqué dans un cycle négatif. Le meilleur réglage dépend des autres participants. En particulier, « œil pour œil avec pardon » est plus efficace si la communication est brouillée, c'est-à-dire s'il arrive qu'un autre participant interprète à tort un coup. Dans ce cas, je commence par coopérer, et si je suis trahi, je coopère à nouveau, mais une seule fois. Notons qu’Il est possible de jouer à ce jeu sur certains serveurs internet.[2]

Les recherches et publications concernant ce jeu sont florissantes du fait de nombreuses stratégies et variantes possibles. La conclusion la plus simple de ce jeu est que les stratégies de coopération l’emportent en termes de gains personnels sur les stratégies de trahison.

Pour le docteur en psychologie et en philosophie Tal Ben-Shahar :

« Celui qui contribue au bien-être d’autrui en tire tant de bénéfice personnel que, à mes yeux, il n’y a pas plus égoïste qu’un geste généreux. Non seulement l’humeur est améliorée, mais aussi l’image de soi : les circuits de la récompense reçoivent une activation des plus plaisantes. Somme toute, on se fait du bien aussi à soi - bénéfice secondaire non négligeable - quand on fait du bien aux autres ».[3]

Quelles sont les « bonnes » stratégies ? Selon les chercheurs en informatique Jean-Paul Delahaye et Philippe Mathieu :

« Les bonnes stratégies sont les stratégies réactives qui répondent quand on les trahit, qui prennent le risque de coopérer (elles commencent par coopérer et face à un adversaire qui coopère, elles ne tentent pas de trahir), et savent être indulgentes (après une trahison de l’adversaire elles finissent par pardonner pour renouer la coopération). Les résultats obtenus par des calculs qui modélisent la sélection naturelle à travers ce jeu conduisent à une conclusion surprenante : bien qu’il n’y ait pas d’autorité de contrôle et que la tentation de la trahison soit présente à chaque coup joué, l’évolution favorise les stratégies qui ne prennent jamais l’initiative de trahir (...) À partir d’une définition élémentaire, le dilemme du prisonnier crée un problème d’une étonnante difficulté dont nous ne réussissons à comprendre les règles que progressivement, ce qui illustre encore une fois que du simple peuvent naître des comportements et des dynamiques d’une richesse sans limite[4]

Autrement dit, dans le cadre d’interactions répétées (famille / voisins / étrangers / collègues etc.), d’un point de vue strictement « comptable » et dans mon propre intérêt « égoïste », je devrais toujours coopérer d’emblée, puis ajuster la relation, c’est-à-dire la stratégie, en fonction de la réponse de l’autre. 

L’altruisme est un égoïsme intelligent

Mais comme tout le monde n’a pas bien compris son propre intérêt à moyen / long terme, il faut s’accommoder bon gré mal gré des nombreuses petites trahisons du quotidien, mensonges et autre mauvaise foi : photos « grand angle » des agences immobilières afin de magnifier la maison à vendre, miroir amincissant des boutiques de prêt à porter (« cette robe vous amincit tellement ! »), sans compter les très nombreux produits en vente à X,99 euros : ce prix ne peut pas être le « vrai » prix, évidemment... Et en plus on vous prend pour une buse qui n’aurait pas vu l’arnaque ! 

On peut allonger la liste avec l’homéopathie, les poudres de perlimpinpin pour soigner l’arthrose, la fatigue, la cellulite, les rides profondes etc., le tout sans aucune preuve d’efficacité réelle en dehors d’un effet placebo plus ou moins « optimisé » par la blouse blanche du médecin ou du pharmacien. En revanche, le prix à payer n’est pas une illusion.

Plus largement, on peut constater que les grandes religions - des sectes qui ont "réussi" - prônent globalement la coopération, l'amour du prochain, reprenant en quelque sorte les résultats du dilemme du prisonnier sans le savoir. Il faut dire que les sectes qui choisissent la trahison comme concept (Thugs en Inde, la Famille Manson, l'Ordre du Temple Solaire, la secte Aum Shinrikyo...) ne font pas de vieux os ; soit une sélection naturelle qui s'applique également à la culture. Ceux qui ne coopèrent pas (au sens large) disparaîtront

Et ce ne sont pas les religions qui sont à l'origine de la morale qui - certes de façon plus primitive que la nôtre - a réglé les interactions entre individus bien avant les premières "grandes" religions. Il suffit pour s'en convaincre d'étudier les interactions animales dans un groupe quelconque : les "règles" de vie en bonne société sont partout présentes, sans religion ni Libre Arbitre... (voir La science peut-elle aider à comprendre - voire infléchir -la moralité humaine ?).

Qui plus est, les "textes sacrés" sont évidemment datés et en conflit ouvert avec notre morale qui a évolué comme il en est question dans cette vidéo aussi amusante qu'effrayante... à la "foi".


[1] Deux autres stratégies ont été identifiées comme tout aussi intéressantes : Pavlov et Gradual :

1) Pavlov : lors du premier coup, je coopère ; ensuite si au dernier coup joué, j’ai gagné 3 points ou plus je rejoue la même chose, sinon je change.

2) Gradual : je coopère au premier coup; ensuite, lorsque mon adversaire me trahit, je le punis le coup suivant (comme dans la stratégie « donnant-donnant »), mais je suis plus sévère car je punis mon adversaire en jouant la trahison pendant X coups consécutifs, où X est le nombre de trahisons passées de mon adversaire (mes punitions sont donc graduelles). Après une telle phase de rétorsion, je coopère deux fois de suite pour tenter de rétablir la paix.

[3] « Apprendre à être heureux - Semaine 19 » - Tal Ben-Shahar

[4] « Le dilemme du prisonnier et l’illusion de l’extorsion » - Jean-Paul Delahaye, Philippe Mathieu -https://www.pourlascience.fr/sr/logique-calcul/le-dilemme-du-prisonnier-et-l-illusion-de-l-extorsion-7694.php____________________________________________

« Le dilemme du prisonnier | Voyages au pays des maths » - VIDEO ARTE Youtube  

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Le cerveau humain : normal... mais déficient

La plupart du temps, nous souhaitons faire les choix les plus rationnels possibles afin de maximiser les bénéfices attendus tout en minimisant les coûts ou les risques. Tout écart par rapport à cette norme est alors perçu comme un biais, biais que nous produisons par centaines tous les jours.

Par exemple cette petite curiosité parmi tant d'autres : le "Paradoxe de Monty Hall" tire son nom de Monty Hall, l'animateur canado-américain de l'émission de jeu télévisé "Let's Make a Deal" (1963-1976 et 1980-2003). Dans cette émission, les candidats devaient choisir parmi trois portes, derrière l'une desquelles se trouvait une voiture et derrière les deux autres, une chèvre.

Le problème de Monty Hall pose la question suivante : imaginez que vous êtes un candidat et que vous avez choisi une porte. Avant de révéler ce qui se cache derrière la porte que vous avez choisie, l'animateur, qui connaît la position de la voiture et des chèvres, ouvre l'une des 2 portes restantes, porte qui s'ouvre sur une chèvre. Restent donc 2 portes dont l'une d'entre-elles vous offre une Cadillac flambant neuve, et l'autre une...

Maintenant, vous avez le choix entre rester sur votre première sélection (après tout, votre intuition de départ n'est peut-être pas mauvaise, et comme il y a 1 chance sur 2, autant garder le premier choix !) ou changer de porte (pourquoi changer puisqu'on a toujours une chance sur 2 ?). 

Devriez-vous changer de porte ou rester sur votre choix initial

Le choix semble tellement simple que l'on commence à renifler un piège... mais lequel ? La solution correcte au problème montre qu'il est avantageux pour le candidat de changer de porte après que l'animateur a révélé une chèvre derrière l'une des autres portes. Ce choix augmente les chances de gagner la voiture à 2/3, tandis que rester sur la porte initiale ne donne qu'une chance sur trois de gagner. Il faut changer de porte quel que soit le choix initialCette solution n'a été mise en évidence qu'après la fin du jeu télévisé : heureusement pour le producteur qui aurait sinon fait faillite très rapidement...

Pour mieux visualiser cette solution peu intuitive, imaginez qu'il y ait 1000 portes (999 avec chèvre et 1 seule avec Cadillac) au lieu des trois portes du jeu. Vous choisissez au hasard ("intuitivement" ?) la porte n°167, puis l'animateur ouvre 998 portes avec chèvre... sauf la porte n° 751. La porte choisie n°167 reste avec la probabilité Cadillac de 1 sur 1000 alors que la porte n°751 regroupe maintenant le reste des probabilités, soit 999 sur 1000. Il faut donc bien changer de porte ! Ce que l'on ne voit pas aussi clairement quand il n'y a que 3 portes. La différence tient au fait que l'animateur sait où est la Cadillac ! La porte qu'il ouvre avec la chèvre n'est pas due au hasard...

Le paradoxe de Monty Hall est devenu célèbre car il met en lumière les intuitions erronées concernant la probabilité et les conditions bayésiennes (voir Théorème de Bayes sachant que tout ce qui est essentiel à savoir n'est pas toujours simple). 

Il faut se rendre à l'évidence : nos cerveaux ne sont pas "câblés" pour faire des probabilités.

Voici cette vidéo ARTE montrant l'intérêt des probabilités... et du "Problème de Monty Hall". Cliquer sur le carré en bas à droite de l'écran vidéo pour la voir en plein écran.



Au delà, on pourrait faire la liste des biais cognitifs qui parasitent les sentiments et pensées humaines au point de nous faire perdre toute rationalité.
Par exemple, il est connu que l'état de la météo du moment agit sur les décisions notamment financières ! 

« Nous  démontrons,  dans  un  contexte  expérimental,  que  l'humeur  peut  effectivement  influencer  l'aversion  au  risque  et  donc  le  cours  des  actions."

Des études utilisant diverses tâches de tricherie démontrent que lorsque la possibilité de tricher offre l'incitation intrinsèque d'influencer positivement un aspect de soi, les individus obtiennent de meilleurs résultats (c'est-à-dire trichent), se livrent à une auto-illusion diagnostique et améliorent ainsi leur perception de soi. Moi, moi, moi, moi etc. On peut certes continuer à se mentir, mais la réalité est coriace : elle finira toujours par nous rattraper. Comme le précise le neuroscientifique Mathias Pessiglione...
"Nos choix sont souvent rationalisés a posteriori, pour les conformer à une norme de cohérence que leurs causes réelles ne respectent pas forcément. On découvre ainsi que l’architecture fonctionnelle du cerveau, façonné par la sélection naturelle, impose des contraintes cachées sur les préférences, qui peuvent varier d’un individu à l’autre ou chez un même individu d’un moment à l’autre."

Le biais du survivant n’est pas mal non plus. Il s’agit d’une erreur logique qui se produit lorsque l'on ne prend en compte que les "survivants" (individus, objets, données, etc.) d'un processus, en ignorant ceux qui n'ont pas survécu ou qui ont été éliminés. Cela conduit à une vision déformée de la réalité, car les informations des "non-survivants" sont cruciales pour une analyse complète. En d'autres termes, on tire des conclusions basées sur un ensemble de données incomplet, ce qui peut mener à des jugements erronés. Par exemple, pendant la Seconde Guerre mondiale, les statisticiens devaient déterminer où renforcer le blindage des avions pour minimiser les pertes. Ils ont d'abord examiné les avions qui étaient revenus de mission et ont constaté que la plupart des dégâts se trouvaient sur les ailes et l'arrière du fuselage. La première intuition était de renforcer ces zones. Cependant, le statisticien Abraham Wald a fait remarquer que c'étaient justement les avions qui avaient été touchés à ces endroits qui avaient pu revenir. Les avions touchés au moteur ou au cockpit (les "non-survivants") ne revenaient tout simplement pas. La conclusion correcte était donc de renforcer les zones non endommagées sur les avions de retour, car c'était là que les avions abattus avaient probablement été touchés. Subtil, non ?

Bref, il devient essentiel de pouvoir penser - dès l'école - contre son cerveau (voir Penser... contre son cerveau).

A ce propos, des supports comme celui-ci (Pseudosciences) devraient faire le bonheur des écoliers tout en introduisant l'un sujet des plus importants dans ces temps de retour aux croyances médiévales : qu'est-ce que la science.
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Pour aller plus loin : le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous