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Un psychiatre sceptique du libre arbitre... à raison !

Joachim Müllner est un jeune psychiatre français, spécialisé en médecine légale, qui s'est posé la question du libre arbitre (LA) : sujet majeur dans le cadre de son exercice de praticien en relation avec des personnes atteintes de troubles psychiatriques dont la liberté de la volonté peut être altérée, voire abolie selon les canons en vigueur actuellement.

Sujet qui devrait intéresser également au plus haut point la Justice puisque ce LA est à l'origine des notions de culpabilité et de punition, sans oublier le mérite et le talent qui s'appuient sur la même chimère et seraient censés justifier les inégalités de traitement entre humains. On ne peux pas dire que ce débat philosophique et scientifique de fond soit abordé tous les jours dans l'espace médiatique ou éducatif... 

Mais restons sur le versant médical en général, et psychiatrique en particulier. Dans sa chaîne youtube, Joachim Müllner rend compte de données neuroscientifiques qui vont à l'encontre de la croyance dans le LA (voir https://www.youtube.com/watch?v=i7MRqObiJ0Y). 

Au delà, toutes les rubriques de la chaîne méritent une écoute attentive : https://www.youtube.com/@lelibrearbitrenexistepas  

Cette conviction que le libre arbitre est proprement illusoire, conviction étayée scientifiquement, n'est pas sans conséquence sur la pratique psychiatrique, voire au-delà. Ainsi, le hasard a conduit Joachim Müllner à devoir examiner en garde à vue un prévenu ayant tué une femme âgée, un "fait divers" particulièrement atroce et abondamment relayé par la presse. 

Suite à la consultation "à chaud" du meurtrier, le Dr Müllner écrit : 

« L’examen révèle que la personne conduite présente des troubles mentaux manifestes et qu’elle représente un danger imminent pour la santé des personnes et/ou pour elle-même, nécessitant un transfert à l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, sous réserve de l’absence de pathologies somatiques nécessitant une hospitalisation. »  

Ce qui conduit le patient meurtrier vers l'infirmerie psychiatrique - et non pas la prison. Par la suite, huit experts mandatés ont conclu à l’abolition du discernement du meurtrier au moment des faits, dont un expert qui a précisé que cette abolition du discernement était liée à une consommation de substances toxiques. L'hospitalisation - plutôt que la punition et la prison - a engendré immédiatement un scandale médiatique avec manifestation de plus de 20.000 personnes (procureurs/médecins ?), ainsi qu'une déclaration du Président Macron soutenant la pertinence d'un procès (?) pour ce patient psychiquement irresponsable. Voir https://www.youtube.com/watch?v=lVKMOt1ZuFg. Affligeant.

Assez curieusement, le Dr Müllner a été convoqué 5 années plus tard par une représentation nationale afin qu'il justifie sa décision de l'époque. Situation exceptionnelle... probablement stressante quand on est convaincu de n'avoir fait que son travail, en toute bonne foi. Il n'a fait que rendre un avis médical constatant le trouble mental et la dangerosité du patient pour lui-même (suicide possible) et pour la société, en toute indépendance. Les expertises ultérieures ont d'ailleurs bien montré la pertinence de cette décision initiale.

Sur le fond, "discernement" et "contrôle des actes" sont des euphémismes pour éviter de citer le "libre arbitre", terme trop chargé du point de vue philosophique et frontalement remis en cause par nombre de neuroscientifiques. Les juges évitent tout débat sur un sujet aussi brûlant et doivent se réfugier - quel que soit leur avis personnel - derrière le sens commun, malheureusement erroné. La question de l’altération ou de l’abolition du discernement concerne la société, les juges, les députés... et logiquement la science qui semble paralysée concernant un sujet aussi conséquent pour nous tous, alors même que nous détenons depuis des d'années les éléments scientifiques et philosophiques conduisant à abolir cette chimère d'un libre arbitre ontologique. 

Les troubles de personnalité (psychopathes, sociopathes, pervers narcissiques etc.) sont à l'origine d'un grand nombre de délits et d'incarcérations mais ne sont pas décrits par les spécialistes comme étant pourvus d'un "mauvais" libre arbitre (pour cause) mais plutôt "victimes" d'un patrimoine génétique particulier* associé à un environnement délétère. Des victimes produisant d'autres victimes. Ce qui n'est pas - certes - une raison suffisante pour permettre à ces "malades" de continuer à enfreindre les lois, mais ce qui doit nous faire considérer que leur volonté de "faire mal" n'est pas "libre" et d'en tenir compte dans le sort dramatique qu'on leur réserve actuellement (voir Mais alors, sans culpabilité ni punition possible... quefaire ?)


N.B : suite à l'une des questions de la salle, ce spécialiste indique que les psychopathes sont pour lui "responsables" de leurs actes (préméditation / intentionnalité) en laissant entendre par là qu'ils sont "coupables" et auraient pu faire autrement. 
Responsables certainement (ils doivent rendre des comptes à la société et aux victimes), mais "coupable" certainement pas ; ou alors il faut considérer qu'ils ont un cerveau génétiquement  "normal" de même qu'un environnement non toxique, soit l'inverse de ce que ce spécialiste a affirmé précédemment... Cette confusion entre responsabilité et volonté libre (Libre Arbitre) rend les explications incompréhensibles, ici comme ailleurs. Dommage quand ce type de confusion émane d'un scientifique renommé. Notons que les prémisses de ces psychopathies interviennent dès la petite enfance voire l'adolescence... alors que ces individus ne sont pas censés posséder un quelconque Libre Arbitre (LA) à ces âges, même pour ceux qui croit dans la chimère LA ! Quant à l'espoir de "soigner" ces individus : n'est-ce pas l'indice qu'ils ne sont que malades de leurs gènes et de leur environnement délétère, et que le reste n'est que la persistance erronée de la croyance en une dualité corps / esprit ? 
Concernant la complexité de ces questions, voir https://librearbitre.eu/static/pdf/Evaluation_du_fait_criminel.pdf.

Et puis, il existe des troubles psychiques** qui ne mettent généralement pas en danger la société comme notamment  le Trouble Obsessionnel Compulsif (TOC), l'Hypocondrie, la Syllogomanie, le Syndrome de Gilles de la Tourette (SGT) ou le Trouble Dissociatif de l’Identité (TDI) (cf. témoignage vidéo ci-dessous).


Ces patients ne peuvent lutter contre leurs angoisses, rituels, accumulations d'objets, comportements inadaptés... rendant leur vie - et celle de leurs proches - invivable. Ils en ont pourtant toute conscience mais sont impuissants à contrôler des comportements qu'ils jugent absurdes. Quid de leur libre arbitre ? Ils n'en ont plus ?... Ou alors celui-ci est déficient spécifiquement quand il s'agit de ne pas compter toute la journée le nombre de chaussettes dans l'armoire, de ne pas dire "merde" à tout bout de champ, de ne pas encombrer leur maison avec des détritus variés, de ne pas réagir de façon agressive aux frustrations du quotidien ? 
Ou, plus rationnellement, ces sujets n'ont pas plus de LA que les autres humains et ces troubles ne sont finalement que des dysfonctionnements organiques / biologiques cérébraux en interaction avec l'environnement. Pour le commun des mortels, ces patients ne sont pas "coupables" car ils ne peuvent pas faire autrement, contrairement aux individus dont les troubles dérogent aux lois et qui deviennent subitement "coupables" et punissables alors que le fond du problème est strictement de même nature. Dans le premier cas, on soigne, dans le second, on punit. Et personne ne s'en soucie (c'est tellement bon de punir dès qu'on peut).

La croyance dans un LA ontologique (réel) est non seulement fausse mais délétère à bien des égards pour la communauté humaine, et au delà... (voir Le côté obscur du Libre Arbitre). Finalement, nous portons tous une coresponsabilité à ne pas en tenir compte de l'absence d'un libre arbitre "réel" (en dehors de la sensation qu'on en a) et la charge de la preuve incombe à ceux qui affirment l'existence de ce libre arbitre ontologique que les lois naturelles ne sauraient tolérer. 

“Rien de plus fragile que la faculté humaine d’admettre la réalité, d’accepter sans réserve l’impérieuse prérogative du réel” nous confie le philosophe Clément Rosset ("Le Réel et son double" - 1976).

Cultivons la lucidité, aussi dérangeante soit-elle : il faut s'efforcer de croire dans la réalité, ce qui n'est pas chose facile. 

Mais les faits sont têtus !

N'est-il pas temps d'en tirer enfin les conséquences ? 

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* Etude "Racines neurobiologiques de la psychopathie" (2020) https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7714686/

** Trouble Obsessionnel Compulsif (TOC) : trouble anxieux caractérisé par des obsessions et des compulsions. Les obsessions sont des pensées, des images ou des impulsions récurrentes et intrusives qui causent une grande anxiété. Pour réduire cette anxiété, les personnes atteintes de TOC effectuent des compulsions, qui sont des comportements répétitifs ou des actes mentaux. Par exemple, une personne peut se laver les mains de manière excessive par peur des germes. Les TOC peuvent grandement affecter la vie quotidienne et nécessitent souvent une prise en charge thérapeutique.

 Hypocondrie : trouble anxieux où une personne est excessivement préoccupée par sa santé, craignant constamment d’être atteinte d’une maladie grave malgré des examens médicaux rassurants. Les hypocondriaques interprètent souvent des sensations corporelles normales comme des signes de maladies graves. Ce trouble peut être déclenché par des facteurs de stress psychosociaux, comme la maladie ou la mort d’un proche. La prise en charge inclut souvent une psychothérapie et, si nécessaire, des médicaments pour traiter l’anxiété ou la dépression associée.

Syllogomanie : également connue sous le nom d’accumulation compulsive, est un trouble psychique qui se manifeste par une accumulation excessive et désordonnée d’objets, même s’ils sont inutiles, encombrants, insalubres ou dangereux. Les personnes atteintes de ce trouble ont une grande difficulté à se débarrasser de ces objets, ce qui peut rendre leur lieu de vie quasi-invivable.

Syndrome de Gilles de la Tourette (SGT) : trouble neurologique caractérisé par des tics moteurs et vocaux répétitifs et involontaires décrits par le neurologue français Georges Gilles de la Tourette en 1885. Le SGT est un trouble du développement du cerveau qui se caractérise par des tics comportant des mouvements ou des sons répétitifs et involontaires. Les tics peuvent être moteurs (mouvements du corps) ou vocaux (sons ou mots) => Voir https://www.youtube.com/watch?v=48bpQXVVUH0.

Trouble Dissociatif de l’Identité (TDI) : anciennement connu sous le nom de trouble de la personnalité multiple, le TDI est un trouble mental où une personne présente deux ou plusieurs identités distinctes. Chaque identité peut avoir ses propres souvenirs, comportements et façons de penser. Ce trouble est souvent lié à des traumatismes majeurs vécus pendant l’enfance. Les personnes atteintes de TDI peuvent éprouver des pertes de mémoire pour des événements quotidiens et des informations personnelles importantes. Le traitement inclut généralement une psychothérapie à long terme.

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Pour aller plus loin : le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous