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Un sacré dilemme pour la "Morale" !

Penchons-nous sur un jeu de la Théorie des jeux, discipline des mathématiques et de l'économie qui étudie les situations stratégiques et les interactions entre agents rationnels, permettant d'examiner les tensions entre coopération et trahison chez des agents rationnels : le dilemme du prisonnier

Il met en scène deux détenus soupçonnés d’un vol et emprisonnés dans des cellules séparées. Ne disposant pas de preuve, la police fait à chacun des deux le marché suivant :

"Tu as le choix entre dénoncer ton complice ou non. Si tu le dénonces et qu'il te dénonce aussi, vous aurez une remise de peine d'un an tous les deux. Si tu le dénonces et que ton complice te couvre, tu auras une remise de peine de 5 ans, mais ton complice tirera le maximum. Mais si vous vous couvrez mutuellement, vous aurez tous les deux une remise de peine de 3 ans."

N.B : Les récompenses et pénalités associées aux différentes combinaisons de stratégies peuvent varier selon les sources. Ces valeurs numériques ne représentent qu'un scénario hypothétique utilisé pour expliquer les principes fondamentaux de la théorie des jeux. L'essence du dilemme du prisonnier réside dans les incitations contradictoires des protagonistes.

Dans cette situation, il est considéré que si les deux s'entendent, ils s'en tireront globalement mieux que si l'un des deux dénonce l'autre. Mais justement, l'un des deux peut être tenté de s'en tirer encore mieux en dénonçant son complice, ce qui permet un meilleur gain dans cette configuration. Craignant cela, l'autre risque aussi de dénoncer son complice pour ne pas être le dindon de la farce. Le dilemme est donc : faut-il accepter de couvrir son complice (donc coopérer avec lui) ou le trahir ? 
Lorsque ce jeu n’est joué qu’une seule fois, le plus rentable est de trahir. Ce sont par exemple certains restaurants pour touristes, chers et mauvais, dont la préoccupation n’est pas tant de fidéliser une clientèle que de profiter au maximum de la manne des touristes qui ne font que passer. Mais tout change si le jeu comporte plusieurs sessions (= dilemme du prisonnier répété ou itéré) ; car chacun a vu comment le complice s’est comporté aux tours précédents, ce qui peut faire changer de stratégie pour un meilleur « rendement ». Pour reprendre l’exemple, on ne retourne pas dans un restaurant qui a « trahi » sur la qualité et/ou le prix !

Un concours international a confronté différentes stratégies dans le cadre de ce jeu. Résultat des courses : c’est la stratégie « Donnant donnant » (« œil pour œil » ou « Tit for Tat » en anglais) qui est l’une des plus efficaces dans le cadre du dilemme du prisonnier répété[1]. Elle consiste à coopérer au premier coup puis à systématiquement copier le comportement de son complice à la session précédente. Une variante, « œil pour œil avec pardon », s'est révélée un peu plus efficace encore : en cas de trahison de l'adversaire, on coopère parfois (de 1 à 5 %) au coup suivant. Cela permet d'éviter de rester bloqué dans un cycle négatif. Le meilleur réglage dépend des autres participants. En particulier, « œil pour œil avec pardon » est plus efficace si la communication est brouillée, c'est-à-dire s'il arrive qu'un autre participant interprète à tort un coup. Dans ce cas, je commence par coopérer, et si je suis trahi, je coopère à nouveau, mais une seule fois. Notons qu’Il est possible de jouer à ce jeu sur certains serveurs internet.[2]

Les recherches et publications concernant ce jeu sont florissantes du fait de nombreuses stratégies et variantes possibles. La conclusion la plus simple de ce jeu est que les stratégies de coopération l’emportent en termes de gains personnels sur les stratégies de trahison.

Pour le docteur en psychologie et en philosophie Tal Ben-Shahar :

« Celui qui contribue au bien-être d’autrui en tire tant de bénéfice personnel que, à mes yeux, il n’y a pas plus égoïste qu’un geste généreux. Non seulement l’humeur est améliorée, mais aussi l’image de soi : les circuits de la récompense reçoivent une activation des plus plaisantes. Somme toute, on se fait du bien aussi à soi - bénéfice secondaire non négligeable - quand on fait du bien aux autres ».[3]

Quelles sont les « bonnes » stratégies ? Selon les chercheurs en informatique Jean-Paul Delahaye et Philippe Mathieu :

« Les bonnes stratégies sont les stratégies réactives qui répondent quand on les trahit, qui prennent le risque de coopérer (elles commencent par coopérer et face à un adversaire qui coopère, elles ne tentent pas de trahir), et savent être indulgentes (après une trahison de l’adversaire elles finissent par pardonner pour renouer la coopération). Les résultats obtenus par des calculs qui modélisent la sélection naturelle à travers ce jeu conduisent à une conclusion surprenante : bien qu’il n’y ait pas d’autorité de contrôle et que la tentation de la trahison soit présente à chaque coup joué, l’évolution favorise les stratégies qui ne prennent jamais l’initiative de trahir (...) À partir d’une définition élémentaire, le dilemme du prisonnier crée un problème d’une étonnante difficulté dont nous ne réussissons à comprendre les règles que progressivement, ce qui illustre encore une fois que du simple peuvent naître des comportements et des dynamiques d’une richesse sans limite[4]

Autrement dit, dans le cadre d’interactions répétées (famille / voisins / étrangers / collègues etc.), d’un point de vue strictement « comptable » et dans mon propre intérêt « égoïste », je devrais toujours coopérer d’emblée, puis ajuster la relation, c’est-à-dire la stratégie, en fonction de la réponse de l’autre. 

L’altruisme est un égoïsme intelligent

Mais comme tout le monde n’a pas bien compris son propre intérêt à moyen / long terme, il faut s’accommoder bon gré mal gré des nombreuses petites trahisons du quotidien, mensonges et autre mauvaise foi : photos « grand angle » des agences immobilières afin de magnifier la maison à vendre, miroir amincissant des boutiques de prêt à porter (« cette robe vous amincit tellement ! »), sans compter les très nombreux produits en vente à X,99 euros : ce prix ne peut pas être le « vrai » prix, évidemment... Et en plus on vous prend pour une buse qui n’aurait pas vu l’arnaque ! 

On peut allonger la liste avec l’homéopathie, les poudres de perlimpinpin pour soigner l’arthrose, la fatigue, la cellulite, les rides profondes etc., le tout sans aucune preuve d’efficacité réelle en dehors d’un effet placebo plus ou moins « optimisé » par la blouse blanche du médecin ou du pharmacien. En revanche, le prix à payer n’est pas une illusion.

Plus largement, on peut constater que les grandes religions - des sectes qui ont "réussi" - prônent globalement la coopération, l'amour du prochain, reprenant en quelque sorte les résultats du dilemme du prisonnier sans le savoir. Il faut dire que les sectes qui choisissent la trahison comme concept (Thugs en Inde, la Famille Manson, l'Ordre du Temple Solaire, la secte Aum Shinrikyo...) ne font pas de vieux os ; soit une sélection naturelle qui s'applique également à la culture. Ceux qui ne coopèrent pas (au sens large) disparaîtront

Et ce ne sont pas les religions qui sont à l'origine de la morale qui - certes de façon plus primitive que la nôtre - a réglé les interactions entre individus bien avant les premières "grandes" religions. Il suffit pour s'en convaincre d'étudier les interactions animales dans un groupe quelconque : les "règles" de vie en bonne société sont partout présentes, sans religion ni Libre Arbitre... (voir La science peut-elle aider à comprendre - voire infléchir -la moralité humaine ?).

Qui plus est, les "textes sacrés" sont évidemment datés et en conflit ouvert avec notre morale qui a évolué comme il en est question dans cette vidéo aussi amusante qu'effrayante... à la "foi".


[1] Deux autres stratégies ont été identifiées comme tout aussi intéressantes : Pavlov et Gradual :

1) Pavlov : lors du premier coup, je coopère ; ensuite si au dernier coup joué, j’ai gagné 3 points ou plus je rejoue la même chose, sinon je change.

2) Gradual : je coopère au premier coup; ensuite, lorsque mon adversaire me trahit, je le punis le coup suivant (comme dans la stratégie « donnant-donnant »), mais je suis plus sévère car je punis mon adversaire en jouant la trahison pendant X coups consécutifs, où X est le nombre de trahisons passées de mon adversaire (mes punitions sont donc graduelles). Après une telle phase de rétorsion, je coopère deux fois de suite pour tenter de rétablir la paix.

[3] « Apprendre à être heureux - Semaine 19 » - Tal Ben-Shahar

[4] « Le dilemme du prisonnier et l’illusion de l’extorsion » - Jean-Paul Delahaye, Philippe Mathieu -https://www.pourlascience.fr/sr/logique-calcul/le-dilemme-du-prisonnier-et-l-illusion-de-l-extorsion-7694.php____________________________________________

« Le dilemme du prisonnier | Voyages au pays des maths » - VIDEO ARTE Youtube  

Cliquer sur le carré en bas à droite de l'écran vidéo pour la voir en plein écran

Coopération versus Trahison

Le dilemme du prisonnier montre de façon assez surprenante que les stratégies humaines (et plus largement naturelles) de coopération l'emportent sur le moyen/long terme sur les stratégies de trahison.

Que donne un monde où la trahison est la règle ?

Les individus, entreprises et nations partent du principe que tout le monde cherche à maximiser son propre intérêt au détriment des autres. La confiance serait quasi inexistante.
Les relations sont opportunistes et éphémères. Les engagements (contrats, promesses, alliances) sont systématiquement rompus dès qu’un avantage individuel apparaît et la rivalité est omniprésente, mais sans cadre éthique ou coopératif, elle dégénère en conflits, sabotage ou exploitation.
Les relations humaines sont marquées par la suspicion. Les amitiés, les partenariats amoureux ou professionnels sont fragiles, car chacun craint d’être trahi.
La culture valorise l’individualisme extrême, la ruse et la victoire à tout prix. Les héros sont ceux qui “gagnent” en manipulant ou en écrasant les autres.
Les institutions (gouvernements, écoles, associations) sont faibles, car personne ne respecte les règles communes. La corruption est endémique.

En économie, les marchés sont chaotiques, car les entreprises trichent (fraudes, non-respect des contrats, dumping). Les coûts de transaction explosent à cause des garanties nécessaires pour limiter les trahisons (avocats, assurances, surveillance). L’innovation stagne : partager des idées ou collaborer sur des projets est risqué, car les partenaires volent ou sabotent. Les progrès technologiques sont lents. Les ressources sont gaspillées dans des luttes pour le pouvoir ou des conflits (guerres commerciales, litiges).

Concernant la politique et les relations internationales : les nations s’engagent dans des guerres ou des courses aux armements sans fin, car aucune alliance ne tient. Les traités sont violés dès qu’un avantage unilatéral apparaît. Les problèmes globaux (changement climatique, pandémies) sont ignorés, car aucun pays ne veut investir dans des solutions collectives sans garantie de réciprocité. Les organisations internationales sont inefficaces, minées par des veto et des agendas cachés.

Les conséquences à long terme sont catastrophiques !

Ce monde est instable et autodestructeur. Les ressources s’épuisent, les conflits s’intensifient, et la qualité de vie décline. Le dilemme du prisonnier, où la trahison mutuelle donne le pire résultat collectif, se répète à l’infini.
La société pourrait s’effondrer ou évoluer vers un système autoritaire extrême, où une force centrale impose l’ordre par la peur, limitant les trahisons mais au prix de la liberté...

Fort heureusement, nous ne sommes pas dans ce cas-là. 
Enfin... 

On peut toujours rêver à un monde où la coopération domine !

Les individus et groupes supposent que les autres agiront pour le bien commun. La coopération est la norme, renforcée par des mécanismes de réciprocité et de réputation.

Les relations sont durables, basées sur des engagements mutuels. Les conflits sont résolus par le dialogue et la négociation.
La rivalité existe (par exemple, dans le sport ou l’innovation), mais elle est encadrée par des règles et des valeurs partagées, évitant les comportements destructeurs.

Les relations humaines sont profondes et solidaires. Les communautés prospèrent grâce à l’entraide, que ce soit dans les familles, les quartiers ou les organisations. La culture célèbre la collaboration, l’empathie et les réussites collectives. Les héros sont ceux qui unissent, innovent ensemble ou résolvent des problèmes communs. Les institutions sont robustes, car les citoyens respectent les lois et participent activement à leur amélioration. L’éducation met l’accent sur la coopération et la résolution de conflits.

En économie, les marchés sont efficaces et stables, car les entreprises collaborent sur des standards, partagent des innovations et respectent les contrats. Les coûts de transaction sont faibles grâce à la confiance. L’innovation explose : les chercheurs, entreprises et gouvernements partagent leurs découvertes, accélérant les progrès technologiques (par exemple, des percées en énergie renouvelable ou en médecine). Les inégalités sont réduites, car la coopération favorise des politiques de redistribution et des opportunités équitables. Les ressources sont gérées de manière durable.

Politique et relations internationales : les nations forment des alliances solides pour résoudre les problèmes globaux. Des accords climatiques, des campagnes de santé publique ou des traités de paix sont respectés et renforcés. Les organisations internationales (comme une ONU renforcée) coordonnent les efforts mondiaux avec succès, car les pays privilégient le bien commun sur les intérêts nationaux à court terme. Les conflits sont rares et résolus par la médiation. Les budgets militaires diminuent, libérant des ressources pour l’éducation, la santé ou l’infrastructure.

Les conséquences à long terme sont bénéfiques !!

Ce monde est stable et prospère. Les problèmes globaux sont gérés efficacement, la qualité de vie augmente, et les sociétés s’adaptent aux défis grâce à la collaboration.
Le dilemme du prisonnier est résolu par des stratégies coopératives (comme “donnant-donnant” dans les jeux itérés), où les acteurs maximisent les gains collectifs tout en protégeant leurs intérêts.
Cependant, ce monde pourrait être vulnérable à l’exploitation par des acteurs opportunistes si des mécanismes de sanction ou de vigilance ne sont pas en place.

En conclusion, le monde de la trahison est un cercle vicieux menant à l’épuisement des ressources et à l’instabilité. Le monde de la coopération est un cercle vertueux favorisant la durabilité et la résilience.

La trahison freine l’innovation par peur du vol ou du sabotage ; la coopération l’accélère par le partage et la synergie.

La trahison crée un environnement stressant, où chacun est isolé ; la coopération favorise le bien-être, la sécurité et l’épanouissement collectif.

Aucun de ces mondes n’existe sous forme pure. Le monde réel oscille entre les deux, avec des contextes où la trahison domine (Vous ne trouvez pas qu'il commence à faire un peu chaud ?) et d’autres où la coopération prévaut (par exemple, les alliances scientifiques). 
Le défi est de concevoir des systèmes qui favorisent la coopération tout en dissuadant la trahison. 

Une utopie ? 
Tout dépend de nous.

Pour ceux qui cherchent à comprendre les origines de la paix et de la guerre - sujet très connexe - voir cette conférence particulièrement riche de Hugo Meijer, chargé de recherche CNRS au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po Paris : "Aux origines de la guerre et de la paix dans l’espèce humaine"

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Et pour aller plus loin, le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous

Banalité du mal

 Manger du porc, c'est pas bien pour le cochon, mais bien pour le ténia, mais mal pour l'humain infesté, mais bien pour le médecin qui gagne une consultation, mais mal pour la sécurité sociale qui rembourse consultation et médicaments, mais bien pour le laboratoire qui vend le traitement idoine...

Le mal pour l'un est le bien pour un autre. Un truisme. Mais il ne faudrait pas confondre "banalité du mal" et "banalisation du mal". 

Le concept de "banalité du mal" a été développé par Hannah Arendt dans son ouvrage "Eichmann à Jérusalem : Rapport sur la banalité du mal" en 1963. Adolf Eichmann, haut fonctionnaire nazi responsable de la logistique de la Solution finale, n'était pas motivé selon la philosophe par la méchanceté ou la cruauté, mais plutôt par son obéissance aux ordres et son manque de réflexion sur les conséquences morales de ses actions. Une victime produisant des victimes ?

Pour Arendt, la "banalité du mal" n'est pas un concept théorique, mais une constatation issue de son expérience personnelle et de son observation du procès Eichmann : les personnes ordinaires peuvent commettre des actes horribles lorsqu'elles sont immergées dans un système totalitaire qui normalise et légitime de telles actions. Arendt n'a jamais eu l'intention de minimiser la gravité des crimes nazis ou de décharger les coupables de leur responsabilité. Elle a plutôt cherché à mettre en lumière les dangers des systèmes totalitaires transformant des personnes ordinaires en instruments de destruction massive. On retrouve par exemple cette idée dans le film de Louis Malle "Lacombe Lucien"* qui montre la facilité avec laquelle un individu "ordinaire" peut basculer dans l'ignominie, un peu par hasard, sans vraiment prendre conscience de ce qu'il fait.

Les expériences de Milgram et de Standford ont exploré cette face sombre de l'humain concernant plus particulièrement la soumission à l'autorité.

L'expérience de Milgram, menée à l'université Yale en 1961, visait à étudier le degré d'obéissance d'individus lambda lorsqu'ils étaient amenés à infliger des décharges électriques à une tierce personne, sur instruction d'une autorité perçue comme légitime. Les participants étaient invités à administrer des chocs croissants à un autre participant (en réalité un comédien) s'il donnait une mauvaise réponse à une question posée. L'objectif était d'évaluer jusqu'à quel niveau de douleur les participants étaient disposés à aller, uniquement parce qu'on leur demandait. Les résultats ont montré que beaucoup de participants allaient jusqu'à causer des blessures sérieuses, simplement parce qu'ils avaient été fortement priés de le faire.

Quant à l'expérience de Stanford, elle a été dirigée par Philip Zimbardo en 1971. Cette étude visait à observer le comportement des gens placés dans des rôles de geôlier et de prisonnier, dans le cadre d'une simulation de prison. Les participants ont été divisés en deux groupes aléatoires, assignés respectivement aux fonctions de geôlier et de prisonnier. Zimbardo a observé que les simulations de hiérarchie, de pouvoir et d'obéissance à l'autorité instituée avaient un effet profond sur les participants qui endossaient rapidement leurs rôles et adoptaient des comportements violents et sadiques envers les détenus. Face à la tournure dramatique des événements, Zimbardo a finalement été obligé d'arrêter l'expérience prématurément.

Ces études semblent donc montrer qu'une part importante des individus lambda d'une population en régime démocratique lambda sont capables du pire. Résultats fort intéressants... sachant que plusieurs des cobayes humains qui se sont prêtés volontairement à cette expérience en sont ressortis avec des séquelles  psychologiques importantes et injustifiables de nos jours du point de vue éthique.

Point final ?

Non pas, comme le montre cette vidéo de David Louapre (chaîne "ScienceEtonnante", toujours très intéressante https://www.youtube.com/watch?v=7Vy1Cg5O5Pc) qui nous propose quelques interrogations légitimes sur la méthodologie et les quelques "cachotteries" relevées.

Les critiques sont cohérentes, mais un point me paraît crucial : les tortionnaires nazis n'étaient pas des citoyens lambda d'un régime démocratique (bien qu'Hitler ait été "élu" dans le cadre d'un accord de coalition en 1933) mais subissaient - ou étaient acteurs convaincus - d'une idéologie particulière, une dictature totalitaire, où certains humains étaient considérés depuis nombre d'années comme des "sous-hommes" (untermenschen) parce que juifs, homosexuels, malades mentaux, tziganes** etc. 

Par ailleurs, les SS dépositaires des basses besognes étaient recrutés selon certaines modalités ; en fait des candidats soigneusement sélectionnés en fonction de leur origine ethnique, leur allégeance au parti Nazi, leur situation financière, leur âge, leur statut marital et leur santé physique. Les recrues devaient réussir une série de tests physiques et psychologiques et, dans la foulée, ces nouveaux membres SS étaient soumis à une intense formation avec lavage de cerveau idéologique. Ils étaient "instruits" sur les principes de la pureté raciale, de l'obéissance aveugle et de la loyauté envers Adolf Hitler et le parti Nazi. On est ici très loin du sujet américain des expériences décrites. De là à penser que certaines recrues SS étaient de véritables psychopathes ou pervers narcissiques trouvant dans ces circonstances l'occasion de montrer leur talent... (voir https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024_05_12_archive.html). 

Ce qui nous ramène également à l'altricité et à la dépendance des humains dans leur enfance avec nécessité d'obéir à l'autorité pour la survie (voir https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024_05_09_archive.html), ce qui continue adulte avec la dépendance - sans hiérarchie - au plombier, médecin, banquier, épicier, impôts, curé, place de parking, numérique et IA... Les positions d'autorité et de dépendance forment un couple infernal que l'on retrouve au cœur des affaires de mœurs dans l'Eglise, l'entreprise, au sein de la famille et du couple etc. Il n'est pas besoin de convoquer un point Godwin pour constater la banalité du mal.

Quelles que soient les critiques que l'on peut formuler, les expériences de Milgram et Standford illustrent comment des forces extérieures, telle que l'autorité perçue comme légitime, peuvent modeler nos comportements et nous amener à agir contre notre conscience, notre volonté, nos valeurs. Elles posent la question de la responsabilité personnelle et collective face aux pressions exercées par les structures de pouvoir, ainsi que l'importance de reconnaître et de résister aux schémas de manipulation et de contrainte sociale. Ce qui montre toute l'importance de la vulnérabilité humaine dans certaines conditions, dont les régimes politiques que l'on se donne (voir https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024_07_03_archive.html). 

On peut également remarquer que tout repose sur la culpabilité supposée de cet autre qu'il faudrait punir puisqu'il est juif, homosexuel... ou simplement ne répond pas correctement à des questions, une raison plus que suffisante pour obéir à l'autorité supposée et punir par une décharge électrique mortelle ! 

Mais la dépendance à une autorité n'est pas le seul déterminant d'un "mauvais comportement". L'affaire "Pélicot et les 50 violeurs" de Mazan" nous a montré qu'un mâle lambda (alpha ? bêta ?) peut violer une inconnue droguée à l'invite internet du mari. A part quelques exceptions, ce sont des bons pères de famille, le voisin au bout du couloir, le pompier bénévole... tous héritiers d'un patriarcat ancestral pour lequel la femme est objet. Le mari est décrit par les psychiatres / psychologues comme manquant d'empathie, un pervers narcissique égocentrique avec des fantasmes de nécrophilie... Bien normal tout ça ?

Non si l'on s'en réfère à l'OMS qui définit la santé comme suit :


Un état complet de bien-être physique, mental et social et pas seulement l'absence de maladie ou d'infirmité.

Or, les troubles de la personnalité affectent plusieurs dimensions de la santé, notamment sur le plan mental et social. Peut-on affirmer que les accusés de Mazan ne sont pas "affectés" du point de vue mental et social ? Existerait-il un zone grise entre santé et pathologie mentale, zone dans laquelle on trouverait les "troubles de personnalité" graves ? Pas plus que le reste, ces troubles ne tombent pas du ciel mais "sont le résultat d’une interaction génétique et environnementale. Ainsi, certaines personnes naissent avec une tendance génétique à souffrir d’un trouble de la personnalité et cette tendance est ensuite effacée ou renforcée par des facteurs environnementaux, tels que des expériences ou des sources de stress ou de bien-être." (https://www.msdmanuals.com/fr/accueil/troubles-mentaux/troubles-de-la-personnalit%C3%A9/pr%C3%A9sentation-des-troubles-de-la-personnalit%C3%A9)

Ce qui pose ici et toujours la question de la pathologie mentale que l'on veut disqualifier pour punir sans trop d'état d'âme le mari et les 50 violeurs sur le banc des accusés : ils sont censés pouvoir faire autre chose que le mal ! (voir https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024/05/limite-entre-sante-mentale-et.html).

Mais il faudra autre chose que des condamnations, pourtant de plus en plus sévères, et plutôt comprendre cette trop fréquente asymétrie femme / homme qui tient à la biologie peut-être, aux rapports ancestraux de domination masculine et à une éducation déficiente, sûrement. Il semble qu'une partie de la réponse se trouve dans les traumatismes de l'enfance qu'il faudrait pouvoir prévenir ou traiter à temps. En tout cas, en quoi ces comportements ignobles et "déviants" seraient la preuve d'un libre arbitre déficient ? Bref, un sacré chantier pour notre génération et celles qui suivent, dont quelques précisions sur la notion de consentement...

Car si la punition a pu constituer à moindre frais un élément de la gestion des clans et autres groupes humains à une certaine époque, il est pitoyable d'en être encore là malgré toutes les études montrant par exemple que la punition dans l'éducation des enfants a des effets négatifs, telles que la diminution des performances cognitives et la réduction de la motivation à apprendre. Une étude britannique a ainsi révélé que l'utilisation de la punition corporelle par les parents était associée négativement aux réalisations scolaires des enfants d'âge maternel. Aux États-Unis, une étude a montré que la punition corporelle prédit des niveaux plus faibles de compréhension linguistique chez les enfants de cinq ans***. Et la "simple" humiliation ne fait pas mieux.

De plus, la recherche suggère que les techniques de discipline verbale, telles que l'explication et l'appel à la raison, sont plus susceptibles de stimuler cognitivement les enfants que les punitions corporelles. Par conséquent, les parents qui optent pour la punition physique sont moins susceptibles d'utiliser des méthodes de discipline inductives, ce qui peut entraver la croissance cognitive des enfants. Alors même que l'on sait depuis des années que ces punitions sont néfastes pour l'enfant, elles resteraient bénéfiques pour l'adulte sans aucune justification scientifique ni philosophique ?

Enfin, haine et punition sont des aberrations totales dans le cadre du naturalisme scientifique, position philosophique incompatible avec l'existence d'un libre arbitre ontologique servant de fondement inique à toute forme de punition et de haine.
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** "Mein Kampf" expose une rhétorique virulente anti-juive, accusant les Juifs de conspirer pour affaiblir et dominer la société allemande et européenne. Hitler soutient que les Juifs forment une race inférieure, parasitaire et destructrice qui représente une menace existentielle pour la pureté aryenne et l'identité nationale allemande. Le livre appelle explicitement à l'expulsion des Juifs d'Allemagne et à leur ségrégation.

Concernant les homosexuels : Hitler considère l'homosexualité comme une déviance sexuelle et une menace pour la vitalité et la force de la nation allemande. Il assimile l'homosexualité à une forme de corruption morale et dénonce les "vices" qui saperaient la cohésion sociale et la famille traditionnelle.

Par ailleurs, l'euthanasie des malades mentaux et des personnes handicapées serait une solution pour préserver la santé et la pureté de la race aryenne car ces personnes seraient un fardeau pour la société et un obstacle à la réalisation de la société idéale nazie.

Quant aux Tsiganes, ce seraient des nomades sans attaches représentant une menace pour l'ordre social et la sécurité. L'auteur affirme que les Tsiganes ne peuvent pas être assimilés et qu'ils doivent être exclus de la société allemande. Hitler justifie cette exclusion en invoquant la prétendue criminalité et la moralité inférieure de cette population.

***https://link.springer.com/article/10.1023/A:1021891529770 et https://www.apa.org/pubs/journals/releases/bul-1284539.pdf

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Et pour aller plus loin, le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous


Combien de Mondes ? 8 milliards !

La génétique, l'épigénétique, le climat, la culture locale, l'Histoire... soit des centaines de milliers (millions ? milliards ?) de déterminants dans des proportions différentes d'un individu à l'autre, avant même la naissance.

Bref, chacun est unique dans sa perception du monde, ses valeurs, ses préoccupations pour la survie de lui-même, de son groupe, de ses croyances... 8 milliards de Mondes différents sur une seule Terre. Et  cette unicité s'étend à tout dans l'univers régi par les mêmes lois partout.

Voyez ces topiaires cisaillées le même jour. Par la suite, certaines tiges poussent et "sortent du rang", sans libre arbitre, juste du fait de déterminants dont on est bien incapable d'en connaître le détail (chaos déterministe => voir "Fatalisme ? Fatal error !). Des tiges folles ? Des chefs qui "veulent" se distinguer de la masse ? Des...

Comme l'exprime dans cette vidéo le psychologue et Prix Nobel d'économie qui vient de nous quitter Daniel Kahneman (mars 2024), nous sommes en tant qu'humains littéralement farcis de biais divers, préjugés trop souvent insurmontables, partis pris menant à l'injustice, la domination etc.


Et pourtant, il nous faut trouver un terrain commun acceptable pour tous... Nous ne pouvons pas continuer à nous affronter périodiquement ("guerre de territoire et/ou de civilisation"), à accepter la domination des tous par quelques-uns, à attendre que les autres fassent des efforts sur les émissions de CO2 avant de s'y mettre nous-mêmes etc.

Une utopie ou une question de vie et de mort ?
Mais la démocratie, l'abolition de l'esclavage, les droits de l'Humain - dont ceux des femmes - étaient des utopies il n'y a pas si longtemps, même si leur généralisation n'est pas totalement acquise pour l'instant. La coopération est en marche - malgré quelques soubresauts de trahisons ici ou là - car la survie est à ce prix comme le montre notamment le jeu du dilemme du prisonnier (https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024/05/un-sacre-dilemme-pour-la-morale.html) et l'utopie serait de croire que l'on peut continuer comme ça sans remettre en cause nos croyances par défaut.

Tout semble se passer comme si chacun vivait dans son bunker culturel identitaire (religion / rituels / morale / valeurs du lieu et du moment...) avec quelques sorties punitives erratiques contre le bunker voisin. 


En poussant la métaphore, tous ces bunkers encerclent une place commune (agora ?) formée des besoins humains - et plus généralement du vivant -, d'une nécessaire coopération, d'une plus grande tolérance (sans tout tolérer)... soit le plus Grand Commun Diviseur (PGCD) des bunkers. D'après une étude des plus sérieuses (la mienne), 99,32 % des discussions dans les médias et les foyers concernant la "communauté humaine" (politique / économique etc.) sont du même niveau que les discussions sur les goûts et les couleurs : des opinions diverses.

Parlant de couleurs, prenons l'exemple de la "préférence nationale" (priorité nationale), concept  théorisé et promu par certains groupes politiques, notamment d’extrême droite ; soit une politique visant à donner la priorité aux nationaux d'un pays dans l'attribution de certains droits, prestations ou services, par opposition aux non-ressortissants. Cette politique peut s'appliquer à différents domaines tels que l'emploi, le logement, l'accès aux soins ou encore l'allocation de ressources financières afin de protéger - selon la droite -  la cohésion sociale et la stabilité politique du pays, lutter contre le dumping social et la concurrence déloyale en limitant l'immigration économique, en freinant la course au moins-disant salarial et social et en incitant les employeurs à embaucher en priorité des travailleurs locaux...

Soit. Mais en accordant des traitements différenciés selon la nationalité, la préférence nationale crée des discrimination illégales, injustifiables et contraires aux principes garantis par les conventions internationales et les constitutions nationales. Du point de vue économique cette fois, certaines études* montrent que la restriction de l'immigration et la limitation de l'accès aux marchés du travail et du logement peuvent entraîner des pertes de productivité et de croissance économique, ainsi qu'une augmentation des prix et une baisse de la qualité des biens et des services proposés. En opposant les nationaux aux étrangers, la préférence nationale contribue à creuser les clivages identitaires et à alimenter les discours xénophobes et racistes, minant ainsi le vivre ensemble et la solidarité entre les citoyens.

Toujours cette question de la place du curseur entre d'un côté le "moi d'abord" (America first) et ma survie personnelle, et de l'autre l'égalité des droits humains et la survie du groupe : dilemme entre trahison et coopération si l'on se réfère au dilemme du prisonnier sus-cité. 
Et tout ceci est histoire d'idéologie car s'il existe 8 milliards de Mondes, il n'existe en fait que deux visions concurrentes possibles : la vision spiritualiste (idéaliste) et la vision matérialiste (naturaliste scientifique), chacune se déclarant légitime pour réguler l'agora commune (justice / économie / politique etc.). 

Ce qui revient à poser un question princeps à toute discussion : d'où parle-t-on quand on émet un avis, une conviction, une injonction normative ? Avez-vous souvenir d'un débat de fond sur le sujet ? Une émission ? Un article ?

C'est tout l'objet de la vidéo ci-dessous... avec une décision / responsabilité personnelle à prendre si l'on souhaite gommer en partie le défaut... de penser par défaut, ce qui engage parfois à devoir penser "contre son cerveau" ( voir https://illusionlibrearbitre.blogspot.com/2024_06_23_archive.html).

Le corbeau croasse et l'Homme croit

"Le corbeau croasse, et l'herbe croît
Le crapaud coasse, et l'Homme croit"
Claude Nougaro (à peu près)

Je "crois" que la Terre est ronde. Pourtant, je ne l'ai jamais vérifié par moi-même mais je tiens compte de tous les éléments scientifiques accumulés. 

Ce qui n'est manifestement pas une attitude (altitude ?) allant de soi :

Les croyances peuvent pourtant être utiles, fournissant à l’individu une représentation plus ou moins fiable de son environnement afin de contribuer à des prises de décision adaptées au contexte. Contrairement aux simples perceptions, le contenu informationnel des croyances permet aux individus de dépasser l’ici-et-maintenant auquel ils sont reliés par leurs organes sensibles.

La notion de croyance sert à désigner l’adhésion à des idées, des opinions, des valeurs sans qu’une démonstration rationnelle, empirique ou théorique n’ait toujours été convoquée à l’élaboration et l’adoption des croyances en question. La croyance peut être simplement une idée, une pensée qui, maintes fois répétée, devient "notre réalité". 

Les  croyances peuvent être plus ou moins "chargées", aussi bien au niveau épistémique (la qualité informationnelle des contenus entretenus), affectif (les conséquences de leur vérité pour le bien-être de l’individu), que social (le degré auquel elles sont partagées au sein de son groupe d’appartenance).

Finalement, la croyance est un sujet complexe qui fait l’objet de nombreux débats théologiques, philosophiques et scientifiques depuis fort longtemps. 

Comme nous le précise le théologien (!) Hans-Ferdinand Ange : 

"De  nouvelles  découvertes  en  neuroscience  cognitive  montrent  que  les  croyances  sont  le  produit  de  processus  cérébraux  provoqués  par  des   processus  neuronaux  en  évolution  rapide  en  dehors  de  la  conscience  consciente (...) Les preuves empiriques d'un traitement inconscient sont  accablantes. Néanmoins, les gens font confiance à leurs perceptions et les considèrent  comme  subjectivement  vraies."*

Mais on ne devrait pas croire n'importe quoi venant de n'importe qui... sous peine de mort comme l'a montré l'illusionniste, sceptique et investigateur James Randi concernant l'arnaque des chirurgiens à mains nues. 

Vidéo étonnante, et message clair de James Randi : 

« Ne soyez pas trop sûr de vous. Peu importe à quel point vous êtes intelligent ou bien éduqué, vous pouvez être trompé ». 

Mais ça, tout de même, c'est bien un OVNI, non ?


Non : c'est un "nuage lenticulaire".
Voir également cette vidéo qui aborde nos croyances étranges (possibilité de sous-titres en français).

Mais comment s'y retrouver dans cette profusion de croyances chaotiques allant dans tous les sens, contradictoires bien souvent et potentiellement néfastes pour l'individu et/ou le groupe ?

Une boussole : pas de preuves = pas de raisons de croire
Ou encore : la charge de la preuve est supportée par celui qui affirme quelque chose
Ou bien même : "ce qui est affirmé sans preuve, peut être nié sans preuve" (Pierre-Simon Laplace)
Nous sommes au quotidien très loin de cette rigueur !

Et si la science n'explique pas tout, les livres religieux n'expliquent rien du tout. En fait, foi, spiritualité et religiosité semblent se situer dans un circuit cérébral commun centré sur la substance grise périaqueducale (étude). D’autres études sur la religion et la spiritualité (R/S) ont montré plusieurs régions cérébrales potentiellement associées au développement et au comportement du R/S, notamment le cortex frontal médian, le cortex orbitofrontal, le précunéus, le cortex cingulaire postérieur, le réseau en mode par défaut et le noyau caudé (étude), soit des entités bien « matérielles »  ne pouvant pas se passer des lois naturelles.

En science - comme en justice - la charge de la preuve est cruciale pour valider les hypothèses et les théories. Les scientifiques doivent fournir des preuves expérimentales et des données pour étayer leurs hypothèses. Sans preuves solides, une hypothèse ne peut pas être acceptée comme une théorie valide. Ainsi, la médecine basée sur les preuves (ou Evidence-Based Medicine) est une approche visant à intégrer les meilleures données et pratiques scientifiques disponibles dans l'intérêt des patients.

Voici une vidéo intéressante sur la croyance en générale, et la foi en particulier. A voir, vraimentCroire ou ne pas croire... et son corollaire concernant le curseur de vraisemblance selon Henri Broch, professeur de physique et directeur du laboratoire de zététique.

Mais au fait : décide-t-on "librement" (libre arbitre) de nos croyances ? 
Le prix Nobel Daniel Kahneman a montré à quel point nos croyances sont influencées par des biais cognitifs. Le biais de confirmation, par exemple, nous pousse à chercher et à interpréter des informations qui confirment nos croyances existantes, limitant ainsi notre capacité à changer volontairement de croyances.
Autre biais bien connu : la dissonance cognitive suggère que les individus ressentent un inconfort lorsqu'ils sont confrontés à des informations contradictoires avec leurs croyances. Pour réduire cette dissonance, ils peuvent soit ajuster leurs croyances, soit ignorer ou rationaliser les nouvelles informations, montrant une résistance au changement de croyance. Continuer de jouer au loto malgré les échecs successifs et penser que plus on perd, plus on se rapproche "statistiquement" du gain mirobolant, ce n'est guère rationnel mais cela fait tellement de bien d'espérer !

La théorie du « cerveau bayésien » prédictif permet de comprendre comment le cerveau génère des inférences afin de déterminer la probabilité des informations sensorielles qu’il va recevoir au fur et à mesure de ses expériences, puis comment il modifie ses croyances en fonction des informations sensorielles perçues.

Bref, une affaire de neurones qui ne soufrent pas de l'existence d'un libre arbitre surnaturel quelconque.

La foi, les "forces de l'esprit"... ne peuvent être que des arrangements subtils du chaos déterministe ; et ce n'est rien d'autre. Ou alors on change de paradigme en glissant du matérialisme vers le spiritualisme comme dans cette séquence avec Jean d'Ormesson (spiritualiste) commentée par J.L. Mélenchon (matérialiste).


Au fait, est-ce que l'animal "croit" ? 
Sans tomber dans un anthropomorphisme débridé, des philosophes suggèrent que les animaux peuvent avoir des croyances implicites basées sur leurs interactions avec le monde. Ces croyances ne sont pas nécessairement conscientes ou réfléchies au sens humain du terme, mais elles influencent leur comportement et leurs décisions toujours dans le cadre du cerveau bayésien commun animal / animal-humain. 
Les études sur la cognition animale montrent que de nombreuses espèces ont des capacités cognitives sophistiquées. Les chimpanzés utilisent des outils, les dauphins ont une conscience de soi et les corbeaux montrent des comportements de planification : donc les corbeaux ne font pas que croasser ; il croient. Ces capacités suggèrent que certains animaux possèdent des formes de "croyance" ou de compréhension du monde. Le lion, de par son obligation de chasser pour survivre, son "éducation" et son expérience de chasse pense / croit "statistiquement" que cette petite gazelle écartée du troupeau sera une meilleure proie à moindre frais. Pour des raisons semblables, je pense / crois d'expérience que cette brioche là est le meilleur choix après avoir étudié son rapport qualité / prix.

Oui mais... quid de la spiritualité que seul l'animal-humain possède ? Notons que de nombreuses espèces animales montrent des signes d'empathie et d'émotions complexes. 

Par exemple, ce chat qui veut jouer avec "son ami" le chien. Le chat fait semblant de le mordre... et regardez l'interaction :


Une fois, deux fois... et c'est une de trop pour le chien qui le fait savoir. Le félin comprend qu'il ne faut pas aller plus loin et fait "allégeance" avec une grande douceur en prenant contact avec la patte du chien et son regard pour montrer que c'était juste pour jouer. Et en plus, il parle !
Attendrissant, non ? 
Certains pourraient avancer que cette interprétation est entachée d'anthropomorphisme. Je n'y crois pas une seconde étant donné la séquence des actions et des émotions générées dans cette vidéo qui met en scène des éléments vécus également par les humains. On peut rapprocher tout ceci du dilemme du prisonnier (voir Un sacré dilemme pour la "Morale" !montrant les tensions entre coopération et trahison. Il ne s'agit pas d'une différence de "nature" entre animal et humain mais juste une différence de "degré" dans la complexité des interactions, ce qui montre à nouveau le continuum entre animal et humain.

Autre exemple : les grands singes peuvent éprouver de la tristesse, de la joie et du deuil. Ces émotions peuvent être liées à des expériences spirituelles chez les humains. Certains animaux, comme les dauphins, les grands singes, les pies et les corbeaux, les éléphants d'Asie etc., montrent des signes de conscience de soi, ce qui est un élément central de nombreuses expériences spirituelles humaines (la capacité de se reconnaître dans un miroir est un indicateur de conscience de soi).
Certains animaux montrent des comportements qui pourraient être interprétés comme étant des rituels. Par exemple, les éléphants sont connus pour avoir des comportements complexes autour des dépouilles d'autres éléphants, ce qui pourrait suggérer une forme de respect ou de rituel.

Mais les animaux n'ont pas le langage ! 

Enfin... ce dialogue (!!) avec un primate laisse rêveur : voir conversations avec Koko, la gorille.

Pourrait-on enfin admettre le continuum évident entre animal et humain, sans l'ombre d'un libre arbitre ontologique dans les deux cas ?

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*Credition and the neurobiology of belief: the brain function in believing - Hans-Ferdinand Ange - https://doi.org/10.20935/AcadBiol7359

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Et pour aller plus loin, le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous

PUNIR, sinon...

Sinon quoi ?
On ne pourrait plus régler les conflits ? 


La plupart de nos concitoyens ont compris que fouetter son enfant n'était plus acceptable. C'était pourtant bien pratique, rapide et simple ; pour lui "apprendre à vivre", une fois pour toutes. Il fallait le faire pour être un "bon" parent.

"Bats ta femme tous les matins : si tu ne sais pas pourquoi, elle elle le sait". Simple, rapide, efficace ? Dans le doute, autant frapper (si on est en position de force évidemment) ; Dieu reconnaîtra les siens. Il faut bien en passer par là pour se faire obéir... et plaisir. 

Car les neurosciences ont révélé que le système de récompense du cerveau joue un rôle crucial dans le plaisir ressenti lors de la punition... des autres, principalement. Ce système est associé à la libération de dopamine, un neurotransmetteur lié au plaisir et à la satisfaction. Lorsque nous punissons, notre cerveau active les mêmes circuits de récompense que ceux impliqués dans d’autres activités plaisantes, comme manger ou écouter de la musique. Une étude a montré que les participants ressentaient une activation accrue du striatum, une région du cerveau associée à la récompense, lorsqu’ils infligeaient une punition à quelqu’un qui avait enfreint une règle. Cette activation était corrélée à un sentiment de satisfaction et de justice.

Donc, la sélection naturelle "culturelle" nous encourage à punir, avec plaisir... sans pour autant être considéré comme sadique. Plus généralement, le plaisir est souvent associé à des comportements qui - sans le plaisir associé - risquerait de nous faire disparaître (orgasme pour activer la reproduction, plaisir de se nourrir d'aliments sains, plaisir d'offrir dans le cadre de la consolidation des relations humaines indispensables à la survie etc.).

Mais pour que la punition-plaisir soit justifiable, il faut bien que le sujet à punir ait la possibilité de faire mieux que ce qu'il a fait, qu'il ne soit pas entièrement déterminé et possède un choix "libre" dans ses actions, bonnes ou mauvaises pour la société, la famille, l'école...


Prenons en compte quelques secondes les arguments suivants : si l'on punit, c'est bien pour "corriger" un libre arbitre "défaillant" qu'il faudrait "rééduquer". Ce qui signifie que ce fameux libre arbitre serait théoriquement sensible au déterminant externe qu'est la punition (généralement non souhaitée par le "délinquant"). Soit un déterminant qui agirait sur un arbitrage censé être libre de détermination quelconque. Voyez l'ineptie qui détruit ainsi les prémisses d'un libre arbitre tout puissant. Tout revient en somme à modifier les déterminant à travers un libre arbitre qui ressemble fort à un fantôme.

Mais les progrès philosophiques et scientifiques ont permis de douter à la fois de l'efficacité et du bien fondé moral concernant les maltraitances punitives destinées, par exemple, à guérir les malades mentaux. Les animaux et les enfants n'ayant "notoirement" pas de libre arbitre même pour les plus zélés des croyants dans cette chimère, il devenait difficile de les punir, physiquement en tout cas. Le déterminisme (même mâtiné d'indéterminisme quantique) étant le seul paradigme permettant la connaissance, le libre arbitre n'a plus d'existence possible et ne permet plus la punition, sauf à être sadique ou profane sur ces sujets (voir Libre Arbitre).
Croit-on vraiment que maltraiter va "redresser" les déterminants délétères d'un individu ? Faut-il frapper un enfant qui vient de frapper un camarade pour lui apprendre que frapper, c'est pas bien ? La peine de mort devrait-elle servir d'exemple pour supprimer les homicides ? Ça marche ? Vraiment ?

Tout ceci me rappelle un dessin des années 70 dans le journal Le Monde qui mettait en présence un américain libérant un prisonnier de longue date - sortant d'une cage trop exiguë - avec cette réflexion profonde : "voyez, je le libère et il n'est même pas capable de tenir debout."


Certes, la croyance en une "fée des dents" pourrait conduire à se laver les dents tous les jours, de sorte que cette croyance constituerait finalement un avantage adaptatif non négligeable... sans en conclure pour autant que la fée des dents existe réellement, ontologiquement. Et si cette fée a rédigé quelque grimoire nous engageant à tuer ceux qui ne se lavent pas les dents 3 fois par jour, doit-on lui obéir ?

De manière similaire, la liberté de la volonté (libre arbitre « réel ») ne peut être qu’une illusion faisant partie d'une « carte mentale » utile du point de vue adaptatif à une époque mais qui ne tient pas compte du « territoire » tel que décrit par la science et la raison, car un libre arbitre « réel » ontologique surplombant nos décisions est tout à fait incompatible avec les lois naturelles. Dès lors, chacun ne peut faire que ce qu’il fait ; et n’aurait pas pu faire autrement (à moins de modifier les déterminants en cause). 
La volonté et les choix existent bien, mais ils sont tenus totalement par nos déterminants ancestraux personnels à la fois génétiques et environnementaux dans un processus stochastique (probabiliste) chaotique ne permettant pas des prévisions certaines... à moins de faire appel évidemment aux voyants, médiums, astrologues, cartomanciennes et autres haruspices etc. qui ne se trompent jamais.

Pour agir afin de "remettre en ligne" les contrevenants aux normes sociales du moment, il faut donc faire émerger de nouveaux déterminants en respectant le fait que chacun fait au mieux et ne peut faire autrement sans de nouveaux déterminants. Il n'est pas question de "faire du mal", de couper un doigt à son enfant chaque fois qu'il ne se lave pas les mains avant de passer à table, ou encore de couper la main gauche du voleur comme le font certains islamistes (avant de passer à la main droite en cas de récidive ; mais tiennent-ils compte du fait que le voleur peut être gaucher ???). Efficace ? Surtout terriblement inhumain - quand on a bien compris ce qu'implique l'absence de libre arbitre - et propice à rendre les "punis" encore plus féroces => voir Mais alors, sans culpabilité ni punition possible... que faire ?

Cultivons le plaisir de coopérer pour un monde sans punitions, haines, vengeances, humiliations, dominations, violences physiques et psychiques, jalousies et autres passions tristes. 

Bannissons de notre vie commune les croyances métaphysiques surnaturelles. 
Ce qui implique, et ce n'est pas le plus facile, de "Penser contre son cerveau".
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Et pour aller plus loin, le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous