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Au royaume des fous furieux

La Fête des Fous au Moyen Âge se célébrait généralement autour de la période de Noël, le 1er janvier (Circoncision de Jésus) ou à l'Épiphanie (6 janvier). Pendant cette fête, les rôles sociaux étaient inversés : les domestiques devenaient les maîtres, et les maîtres devaient obéir aux domestiques.
Les participants se déguisaient en fous, proféraient des obscénités, des mensonges et autres vérités alternatives, organisaient des défilés et des réjouissances dans les rues. 

Nous assistons, médusé, au retour à grande échelle de cette coutume... qui dorénavant sera certes toujours en janvier, mais le 20. Et - belle avancée -, elle ne durera plus une seule journée, mais toute l'année... aux USA ; et pour quatre ans minimum avec Trump et Musk en organisateurs zélés.


Le must du Musk : le milliardaire Elon devient patron du « Doge » (Department of Government Efficiency) qui recrute des « révolutionnaires au QI très élevé, favorables à un gouvernement réduit, et prêts à travailler plus de 80 heures par semaine sur des réductions des coûts peu glorieuses ».

Il est urgent de tout déréguler et de faire des coupes drastiques dans le budget de l’État fédéral américain : 2 000 milliards de dollars. Une paille.

Fin du ministère de l'éducation : à quoi sert ce bastion "public" de wokistes et autres gauchistes puisque le "privé" avec les différentes confessions à la manœuvre va pouvoir nous réexpliquer la côte d'Adam, le Déluge, la pomme, la Trinité et tout ça. Le créationnisme dans toute sa splendeur et la Bible comme livre de référence à l'école.

Trump veut développer la prière dans les écoles tout en favorisant l’enseignement "libre" ou à domicile (voir Religions et enfants...) et dans la foulée "décourager" les vaccinations obligatoires (le virus de la rougeole est ravi). D'ailleurs, le nouveau ministre de la Santé Robert F. Kennedy Jr est un complotiste anti-vaccin. Il a notamment affirmé - là on peut le croire - que des vers avaient mangé une partie de son cerveau, ce qui avait entraîné un "brouillard cérébral" de longue durée. Il prétend par ailleurs que l’exposition à des produits chimiques, les "perturbateurs endocriniens", provoque une dysphorie de genre chez les enfants, contribuant ainsi à l’augmentation du nombre de jeunes LGBTQ + ; il affirme que les radiations Wi-Fi provoquent le cancer ; il établit un lien entre les fusillades dans les écoles américaines et la prescription accrue d’antidépresseurs ; il insiste sur le fait que le Sida est causé par les drogues récréatives consommées par les homosexuels ; il nie le bénéfice de la fluoration de l’eau et envisage d’y mettre un terme aux Etats-Unis. Autant d’opinions farfelues, jamais démontrées par aucune preuve scientifique.

Belle recrue

Nommé au ministère de la Justice mais visé par des accusations d’infractions sexuelles, l’ex-élu à la Chambre des représentants Matt Gaetz a annoncé quelques jours plus tard  renoncer à son poste. Que du beau monde.

Malheureusement, il existe une cohérence apparente dans l'irrationnel : si tout est volonté divine, à quoi sert de se battre contre des causes "matérialistes" si le dernier mot est celui d'un Dieu : il suffit de prier. C'est bien la vision que l'on a du monde qui est en cause (voir Les 2 visions du Monde).
Le moyen-âge est de retour.
Science, Copernic, Darwin, Spinoza, Marx et Freud : au placard.

On assiste juste à la mise en place du délire libertarien d'Ayn Rand (voir Moi, moi, moi... Ayn Rand, la libertarienne adorée de Trump) faisant maintenant feu, avec Trump, de tous les pouvoirs (Présidence, Chambre, Sénat, Cour suprême) dans la main de fous furieux. Rand a biberonné Peter Thiel, cofondateur de PayPal et investisseur influent, qui a exprimé des opinions sur la compatibilité entre la démocratie et la liberté : selon lui, "la démocratie et la liberté ne sont pas compatibles". Thiel pense que la démocratie conduit  à des politiques qui encadrent et contrôlent les individus, ce qui est contraire aux principes libertariens de la liberté individuelle et de la non-intervention de l'État. Il a également mentionné que l'extension du suffrage et l'augmentation des bénéficiaires de l'aide sociale aboutit au fait que la "démocratie capitaliste" est une contradiction formelle, un oxymore évident. Il soutient que ces développements ont conduit à une augmentation de la dépendance à l'égard de l'État, ce qui est incompatible avec les valeurs libertariennes. Fin de l'Etat Providence et chacun pour soi, soit un égoïsme "glorieux" qui remet en question les fondements mêmes de la démocratie moderne. 

Toujours la même rengaine de ceux qui héritent de "bons" déterminants (santé / QI / famille / fortune / environnement au sens large) permettant de "réussir" en s'appropriant une bonne partie du travail des autres, comme si c'était le leur (la méritocratie fait partie du côté obscur du Libre Arbitre => Le côté obscur du libre arbitre).

Trump annonce qu'il va déporter certains immigrés (20 millions ?) au mépris de règles laborieusement acquises au cours de l'Histoire (mais promesse irréalisable selon les spécialistes)... De l'humanisme faisons table rase une bonne fois (foi ?) pour toute, comme de l'humanité entière en forant à tout-va pour le pétrole, le gaz, le dollar : la nouvelle Trinité évangélique.

La misogynie assumée et le racisme déclaré (les immigrés mangent les gentils toutous / Porto Rico : une "île flottante d’ordures") sont devenus de bons arguments pour attirer le vote des femmes, des mâles noirs et des immigrés de toute couleur. 

Un dégagisme des élites pour donner le pouvoir à des milliardaires... Pour reprendre une formule très en vogue : en votant pour Trump, ses électeurs croient qu'ils sont autour de la table alors qu'ils sont au menu !

Autre exemple : Donald Trump a décidé de torpiller l'impôt minimum mondial des multinationales. En dénonçant l'accord conclu en 2021 par quelque 140 pays sous l'égide de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), accord qui instaurait un taux d'imposition minimum effectif de 15 % sur les profits des multinationales réalisant plus de 750 millions de dollars de chiffre d'affaires. C'est tout bon pour réduire les inégalités ?

Ce que le philosophe Michel Feher, invité de l'émission C Politique sur France 5 le 18 novembre, a résumé par :

« Ce qui est promis par Donald Trump, c'est un programme absolument inédit depuis l'Allemagne des années 30, d'épuration ethnique, culturelle, totale. C'est-à-dire qu'il s'agit d'éliminer tous ceux qui sont considérés comme parasites, au premier chef les migrants, ensuite les fonctionnaires, les travailleurs syndiqués, bref ceux qui étaient de l'ordre de ceux qu'il fallait dégraisser sous Reagan, là l'imaginaire est un imaginaire d'épuration, voire de déportation (...)  le fascisme n'est pas du tout absent de l'histoire américaine ».

Dans une vision hégémonique pro-business, Donald Trump veut racheter le Groenland, le canal de Panama et pourquoi pas, le Canada ! Soit la technique de la fenêtre d’Overton élevée au niveau de la géopolitique mondiale (voir Sémantique, affects...politiques).

Pour certains, un chemin fasciste (post-fasciste ?) est en train de se dessiner dans le paysage politique des USA. Encore ces pleurnichards de wokes, sans doute ("Le fil rouge, c'est la remise en cause de la démocratie").

Des fous vous dis-je !

Heureusement, les fous n'ont guère de suite dans les idées : au cours de sa précédente présidence, Trump n'a tenu que 23 % de ses 102 promesses de campagne et a adopté un compromis sur 22 % d'entre elles. Rassurant ?

Ce n'est évidemment pas Trump le problème ; pas plus qu'Hitler en son temps (point Godwin). Nous sommes entrés dans une phase dominée par une idéologie conservatrice / réactionnaire qui ne peut que conduire à quelques catastrophes qui feront balancer à plus ou moins brève échéance du coté progressiste / universaliste. Mais quand ? La tentation serait de ronger son frein, de laisser faire en attendant que ça passe... 
Horreur, fatale horreur. 

Quand on a compris que la coopération l'emportait sur la trahison (voir Un sacré dilemme pour la "Morale"), il nous faut nous engager idéologiquement afin de restaurer autant que possible la vision progressiste universaliste. Fort heureusement, l’évolution favorise les stratégies qui ne prennent jamais l’initiative de trahir ! La morale de l'Histoire est que dans mon propre intérêt « égoïste », je devrais toujours coopérer d’emblée, puis ajuster la relation, c’est-à-dire la stratégie, en fonction de la réponse de l’autre. 
La réponse actuelle qui monte, qui monte, est celle des "illibéraux" rejetant certains principes fondamentaux liés à la liberté individuelle et aux droits humains, soit des régimes politiques qui, tout en maintenant des structures démocratiques minimales, limitent les libertés civiles et l'indépendance judiciaire comme c'est le cas (liste non exhaustive) des dirigeants Viktor Orbán (Hongrie), Javier Milei (Argentine), Jarosław Kaczyński (Pologne), Vladimir Poutine (Russie), Recep Tayyip Erdoğan (Turquie), Jair Bolsonaro (Brésil), Nayib Bukele (El Salvador)... et du dernier en date : Trump.

Mais « Pourquoi les pauvres votent à droite » : c'est le titre de l’ouvrage du journaliste Thomas Frank. L’auteur avance que les électeurs des classes populaires aux États-Unis ont tendance à voter pour des candidats conservateurs, alors même que ces candidats défendent des politiques économiques qui vont à l’encontre de l’intérêt des classes populaires. Selon l’auteur, cette tendance s’explique en partie par la façon dont les conservateurs ont réussi à exploiter les peurs et les insécurités des électeurs des classes populaires. Il soutient que les conservateurs ont utilisé des questions culturelles et sociales, telles que l’avortement, le mariage homosexuel et le contrôle des armes à feu, pour mobiliser les électeurs des classes populaires et les amener à voter contre leurs propres intérêts économiques. D'où le wokisme mis à l'index par tous ces apprentis dictateurs (voir Wokisme et cancel culture). Notons que certains remettent en partie en cause cette analyse en proposant de l'affiner*.

Le seul point positif, puisqu'il nous faut en trouver un, est que l'Europe va devoir réagir. Un mal pour un bien ? 
Qui peut dire ?

*https://journals.openedition.org/espacepolitique/3111

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Pour aller plus loin : le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous

Peter van Inwagen ne sait pas ce qu’est le Libre Arbitre... mais il y croit !

Il est toujours déroutant de constater à quel point les philosophes peuvent avoir des points de vue différents sur à peu près tout, tout comme des artistes cherchant à se distinguer à la fois de leurs prédécesseurs et de leurs contemporains. 

La philosophie doit probablement être un art comme les autres : rien n'est "vrai", tout est subjectif. Une affaire de goût, en somme... à moins de bien vouloir prendre la philosophie "au sérieux" (voir Philosophie : des questions sans réponses ?).

Ainsi, les philosophes analytiques sont globalement plutôt compatibilistes (déterminisme et liberté de la volonté coexistent chez l'humain). Pourtant, l’éminent philosophe compatibiliste et théiste P. van Inwagen écrit :

« Si le déterminisme est vrai, alors nos actes sont les conséquences des lois de la nature et des événements d'un passé lointain. Mais ce n'est pas à nous de décider ce qui s'est passé avant notre naissance, et cela ne dépend pas non plus de nous quelles sont les lois de la nature. Par conséquent, les conséquences de ces choses (y compris nos actes actuels) ne dépendent pas de nous. » [1]

P. van Inwagen affirme donc ici que le Libre Arbitre n’est pas compatible avec le déterminisme ; il semble opter pour la position incompatibiliste. Mais par ailleurs il affirme que ce LA existe bel et bien ! Ce qui revient à dire que le déterminisme est faux ? 

De toute façon, que le déterminisme et/ou l’indéterminisme ("chaotique" ou quantique) soient aux manettes de l'univers, le Libre Arbitre ne peut exister dans aucun des deux cas. Un LA qui serait livré à l’action du hasard ne veut plus rien dire car un lancer de dés pour décider des petites comme des grandes choses ne peut pas s’appeler Libre Arbitre. Mais P. van Inwagen prétend que si un faisceau de causes, tant physiques que psychologiques, a caractérisé le moment où le délinquant a commis un vol, et si la situation devait - ou pouvait - être répétée strictement à l’identique, il est possible que le larcin ne soit pas commis cette nouvelle fois. Difficile à comprendre dans un monde déterministe, même en regardant de près son argumentation, et bien difficile à prouver puisqu’il ne semble exister dans notre monde que des situations uniques, impossibles à répliquer strictement dans les moindres détails. 

En fait, l’auteur établit un lien si fort entre libre arbitre et responsabilité morale que, jouant sur notre attachement presque instinctif à la responsabilité (culpabilité) morale, il veut nous forcer à accepter l’existence du Libre Arbitre en convoquant l’argument de la conséquence 
(voir L'argument de la conséquence). 
Il faut que le LA réel existe, faute de quoi, pas de punition ; et la société exploserait ! 

Notons que par la suite, P. van Inwagen concédera qu’il ne sait pas très bien ce qu’est le Libre Arbitre et qu’il faudrait lui trouver une autre désignation. Laquelle ? Il ne sait pas !!

Mais est-ce bien utile de désigner par une nouvelle expression, un nouveau mot, quelque chose qui ne peut exister ? La Licorne n'existe pas, mais la Loucorne, qui sait ? Car personne n'a prouvé scientifiquement que la Loucorne n'existait pas, pas plus que la Licarne, la Loucarne, la Coularne, la... 

Alors vous voyez bien ! Mais il faudrait se rappeler que prouver l'inexistence de quelque chose est impossible. Pouvez-vous prouver que le Père Noël, le Yéti, les dieux, Satan, le paradis et l'enfer, la pierre philosophale, la vie éternelle... n’existent pas ?

Des artistes vous dis-je...

Sur le fond, P. van Inwagen - cumulant philosophie, théologie et art - ne peut malheureusement imaginer une société sans culpabilité, sans punition, où les délinquants et criminels seraient pourtant rendus inoffensifs - autant que faire se peut - tout en les traitant en humains (voir Mais alors, sans culpabilité ni punition possible... que faire ?).

Dans une veine collatérale, Cyrille Michon, philosophe analytique, théologien et spécialiste du Libre Arbitre, tient des propos quelque peu laborieux, prudents mais surtout abscons[2], l’amenant à conclure tout à la fois que le déterminisme est faux ; que nous sommes parfois (quand ?) responsables de notre comportement ; que nous avons parfois[3] (quand ?) un Libre Arbitre ; et enfin que ce dernier est compatible avec l’indéterminisme ! 
Heureusement, comme il l’admet humblement dans une échappatoire au devoir de cohérence : 

« la philosophie n’est pas forcément réservée à ce monde et l’amour de la sagesse n’est pas limité à la vie sur terre. »[4] ! ??

Proche de la thèse de Peter van Inwagen, Ghislain Le Gousse, agrégé et docteur en philosophie, soutient dans un ouvrage[5] très argumenté que la liberté morale - c’est-à-dire la liberté requise par la responsabilité morale - consiste dans un pouvoir d’agir autrement, c’est-à-dire le « principe des possibilités alternatives (PAP) », ce qui est incompatible avec le déterminisme causal. Mais on ne peut pas faire autrement que ce que l’on fait : une évidence. Mais pas pour tout le monde (voir Peut-on faire autrement ?).

Et justement pas pour David Lewis, autre philosophe analytique qui pense pouvoir violer les lois de la nature[6] d’une certaine manière (au sens faible évidemment), soit une sorte de demi-miracle, une nouvelle contorsion afin de légitimer la thèse compatibiliste affirmant à la fois que tout est déterminé, mais que le Libre Arbitre « réel » ontologique est tout de même concevable ; soit un mariage forcé entre lois naturelles et pensée magique. Je soutiens que les lois naturelles n’ont jamais donné leur consentement à ce mariage contre nature. Il faut noter que ce « pouvoir d’agir autrement » est central dans la réflexion sur la responsabilité versus la culpabilité. Il suffit de lire un résumé de l’encyclopédie philosophique sur la « Responsabilité morale » pour se rendre compte de la complexification à l’envi de certains philosophes[7] concernant cette question. 

Modifions un instant notre focale et admettons qu’un animal - un guépard - ait 3 possibilités pour attraper sa proie : 

  1. S’embusquer et surgir brusquement ; 
  2. Courir après la proie jusqu’à épuisement de celle-ci ; 
  3. Chasser en meute pour encercler le gibier. 

Au passage, des techniques de chasse bien connues des humains. 

Bref, l’animal « choisit librement » de s’embusquer, ce qui est à tout prendre nettement moins fatiguant. Décision qui fonctionne effectivement bien, une fois... mais pas les 9 fois suivantes. A la dixième tentative (impératif de survie), le félin a toujours les 3 mêmes choix théoriques, mais aussi une certaine expérience déterminante des réussites et échecs selon le choix de la technique de chasse... Peut-on affirmer que le guépard pouvait faire autrement dès la première tentative ? Il n’y a aucune raison de le penser car il voulait chasser sans trop se fatiguer, ce qui est pertinent (moindre coût concernant l'objectif de survie). A la dixième tentative, doit-il changer de stratégie du fait des expériences peu concluantes de la simple embuscade ? Il y a quelques chances qu’il change de stratégie s’il veut survivre. 

En fait, les choix sont devant nous et nous prenons la décision la plus favorable... en apparence (car nous n'avons jamais toutes les cartes en main et les biais cognitifs ne sont jamais loin). Pouvons-nous réellement faire autre chose que ce que l’on fait, animal comme humain ? Rien n’est moins sûr. Le cerveau du guépard ne représente que 0,5 % de sa masse corporelle quand celui de l’humain en représente 2 %. Le cerveau de l’humain est nettement plus sophistiqué, plus performant du point de vue cognitif (langage, planification, réflexion, analyse et synthèse etc.) alors que le guépard est nettement mieux loti du point de vue olfactif et en vitesse de pointe. Mais ces différences ne sont qu’une affaire de degrés, non de nature. Affirmer que le guépard ou l’humain « peut faire autre chose que ce qu’il fait » mériterait au moins un début de théorie ou de preuve autre que le simple sentiment qu’on en a. En l’absence d’éléments crédibles, cette hypothèse est proprement surréaliste, mystique.

Toujours dans la lignée compatibiliste, le philosophe Bob Doyle dénonce dans son ouvrage[8] le discours « scandaleux » qui serait actuellement livré aux étudiants en philosophie, prolégomènes affirmant que l’humain n’est qu’une « machine biologique » (voir L'humain : un "robot" biologique ?). 

Horreur ! L’auteur ne peut s’y résoudre et propose une solution au problème du Libre Arbitre passant - pour simplifier (?) - par 4 niveaux :

« Je propose qu'il y ait quatre niveaux dans le développement évolutif du libre arbitre (...) Au niveau le plus bas, la sélection est instinctive. Les critères de sélection sont transmis génétiquement, façonnés uniquement par des expériences ancestrales. Au deuxième niveau se trouvent les animaux dont les expériences passées guident leurs choix actuels. Les critères de sélection sont acquis par l'expérience, y compris l'instruction par les parents et les pairs. Les animaux de troisième niveau utilisent leur imagination et leur prévoyance pour estimer les conséquences futures de leurs choix. Au plus haut niveau, (l’humain ?) la sélection est réflexive et normative. La délibération consciente sur les valeurs de la communauté influence le choix des comportements. »

Doyle s’inquiète des répercussions morale en cas d’incrédulité concernant le LA dans la lignée de l’argument de la conséquence. Mais à moins de faire intervenir la Licorne-LA dès son premier niveau (« sélection instinctive »), je n’y vois qu’une nouvelle tentative de sauvetage du LA par les cheveux, comme nous dit Friedrich Nietzsche. D’un premier niveau « déterminé » ne peut pas pas surgir, dans cette escalade de niveaux, un effet émergeant tout à coup non déterminé, surnaturel. Car toutes les émergences, même les plus sophistiquées (conscience, esprit, morale etc.), obéissent aux lois naturelles qui les ont constituées (voir L'émergence de LENIA).

Si vous y trouvez intérêt, avec un certain courage, voici quelques liens du blog abordant d'autres positions artistiques... pardon, philosophiques :


[1] « Essai sur le libre arbitre » - VRIN - 2017 - p. 56

[2] « Libre arbitre et déterminisme » - https://www.franceculture.fr/conferences/libre-arbitre-et-determinisme

[3] Par foi ?

[4] « Vérité du christianisme ? » - VIDEO Youtube - https://www.youtube.com/watch?v=q-1VlvsVTOY

[6] « Comment peut-on violer les lois de la nature ? L’argument compatibiliste de David Lewis » - https://www.revue-klesis.org/pdf/Klesis-Lewis-8-LeGousse.pdf

[8] « Free will scandal » - https://informationphilosopher.com/books/Free_Will_Scandal.pdf - 2011 - p.382

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Pour aller plus loin : le livre "La dernière blessure" centré sur la notion du libre arbitre (illusoire)... en cliquant sur l'image ci-dessous

"Saucisse" de Frankfurt et courant alternatif

Reprenant à son compte un argument des stoïciens, l’éminent philosophe américain Harry Frankfurt affirme que le principe de l’alternativité[1], c’est-à-dire la possibilité de faire autrement, ne constitue pas un critère en soi pour définir la liberté. Pour lui, la responsabilité morale est compatible avec le déterminisme : une même action pourrait être à la fois déterminée et libre

Etonnant, non ?

Il faut malheureusement entrer dans le détail... Frankfurt distingue deux plans dans la volonté humaine[2] : un plan inférieur constitué de désirs spécifiques pour des buts précis qu’il nomme « désirs de premier ordre », et un plan supérieur qui se définit comme des jugements portés sur ces « désirs de premier ordre » et qu’il nomme « désirs de second ordre »[3]. Ce qui distinguerait un être humain d’un animal, ce sont pour lui ces « désirs de second ordre », là où le Libre Arbitre pourrait faire son œuvre

Selon l’auteur, l’Humain ne se contenterait pas de suivre ses désirs de premier ordre, contrairement aux animaux non humains. Pour reprendre l’exemple de Frankfurt, lorsqu’un chien voit des saucisses chez le boucher et qu’il est affamé, le chien désire manger les saucisses, les vole et les mange : il suit le désir de premier ordre, survie biologique oblige. 


En revanche, un être humain « normal » qui va chez le boucher, même s’il est affamé, ne va pas se précipiter sur les saucisses pour les manger (désir de premier ordre), car il sait qu’avant de satisfaire ce désir il doit acheter les saucisses, ce qui relève du « désir de second ordre » que l’on pourrait qualifier de culturel. Pour Frankfurt, la notion de liberté sous-tend un accord entre désir de premier et de second ordre. Un humain serait libre si ses actions suivent les désirs de premier ordre qu’il a approuvés en fonction de ses désirs de second ordre. Inversement, une personne n’est pas libre si elle suit des tendances (premier ordre) qu’elle ne souhaite pas avoir (second ordre) et qu’elle ressent comme étrangères à elle-même, comme cela arrive dans les cas d’addiction à la drogue où le Libre Arbitre serait impuissant... toujours selon Frankfurt.

On peut cependant objecter qu’un chien possède, tout comme l’animal humain, des désirs de premier ordre comme de second ordre tels que définis par l’auteur : si l’expérience du canidé lui a montré que le boucher donne des coups de bâtons en cas de vol (expérience / embryon de culture), le chien va attendre patiemment que le boucher tournedos[4]. Pourtant, les déterminations interviennent aussi bien sur le premier ordre que sur le second selon le matérialisme. Mais pour Frankfurt, un être humain doit être considéré comme libre à partir du moment où ses actions suivent les tendances qu’il a jugé comme justes, même s’il a été déterminé pour avoir précisément ce système de valeurs-là, et pas un autre. Un agent est donc responsable (coupable) pour une action s’il a approuvé, à l’aune des désirs (filtres ?) de second ordre, les désirs de premier ordre qui ont conduit à l’action.

La morale humaine passe donc par la rétribution du boucher avant de manger la saucisse. Mais que dirait Frankfurt d’un immigré affamé qui vole les saucisses quand le boucher s’est absenté ? Qu’il agit comme un chien ? Autrement dit, les « conflits » entre premier et second ordre sont de même nature déterminée chez l’animal et l’humain. Seul le "degré" de sophistication et non la « nature » du second ordre (morale / culture), peut faire une différence entre animal et animal humain. Mais dans les deux cas, le second ordre de Frankfurt ressemble fort à l’intervention d’un apprentissage « moral » au sens large qui fait la balance entre intérêt (désir) et coups de bâtons (sanction)... Point de liberté de la volonté dans un cas comme dans l’autre. Rien que des nécessités, quel que soit l’ordre. Ces deux ordres, comme le reste de l’univers, sont affaires de déterminations chaotiques, avec une culture et une morale du temps et du lieu qui ne peuvent pas échapper aux déterminants des plus simples aux plus sophistiqués.

Avec une certaine audace, on pourrait rapprocher la distinction de Frankfurt entre décisions / actions de premier et de second ordre des travaux de Daniel Kahneman (spécialiste d’économie comportementale et prix Nobel d'économie en 2002) qui identifie deux systèmes fonctionnels cérébraux : le « système 1 » et le « système 2 ». Le « système 1 » serait intuitif, rapide, ne nécessitant que peu d’énergie dans le cadre des décisions automatiques du quotidien, alors que le « système 2 » serait plus lent, rationnel et énergivore mais permettrait de corriger si besoin les décisions du système 1. Mais point de Libre Arbitre pour Kahneman dans ce processus alliant ces deux systèmes qui ne sont que le résultat d’une évolution déterministe afin d’optimiser nos actions dans le cadre de la survie, encore et toujours. 
En prenant comme exemple la technique de l’amorçage[5] très utilisée en psychologie expérimentale pour « manipuler » les cobayes humains, Kahneman écrit :

« La principale morale des recherches sur l'amorçage, c'est que nos pensées et notre comportement sont influencés, beaucoup plus que nous ne le souhaitons ou en avons conscience, par l'environnement du moment. Pour beaucoup de gens, les résultats de l'amorçage sont incroyables, parce qu'ils ne correspondent pas à l'expérience subjective. Tout aussi nombreux sont ceux qui les trouvent dérangeants, parce qu'ils menacent le sentiment subjectif de libre arbitre et d'autonomie. Si le contenu d'un économiseur d'écran sur un ordinateur sans importance peut affecter votre disposition à aider des étrangers sans que vous le sachiez, êtes-vous vraiment libre ? (...) « Comme vous n'avez que peu de connaissance directe de ce qui se passe dans votre esprit, vous ne saurez jamais que vous êtes parvenu à un jugement différent ou avez pris une décision différente du fait d'un infime changement dans les conditions de votre environnement. »[6]

Une petite influence inconsciente peut changer radicalement notre jugement : nouveau coup de bélier contre un LA « réel » qui serait - c’est le moins que l’on puisse dire - fortement influencé par notre inconscient.

Pour en revenir à Frankfurt qui reprend les idées du philosophe (compatibiliste) John Locke et adore manifestement les paraboles charcutières alambiquées, voici un stratagème pour noyer le poisson. Avec des motifs qui ne sont malheureusement pas précisés (c’est frustrant pour un lecteur du « Nouveau détective »), le docteur Frankfurtstein nous raconte :

« Le docteur Black veut tuer la femme de Jones. Pour parvenir à ses fins, il a implanté à son insu dans le cerveau de Jones un dispositif capable de prendre le contrôle de Jones et de le pousser à tuer sa femme. Mais le docteur Black sait que Jones a prévu de se débarrasser de sa femme. Le dispositif dans le cerveau de Jones est ainsi programmé pour ne s’activer que si Jones renonce à tuer sa femme. Jones tue sa femme de son propre chef et le dispositif n'est jamais activé. Dans ce cas, nous serions censés avoir l’intuition que Jones est moralement responsable de son acte, quand bien même il ne pouvait pas faire autrement. »[7]

Regardons de plus près : dans un cas, Jones tue sa femme « spontanément ». Il est donc « responsable ». Fort bien. Sinon, le dispositif l’oblige à tuer sa femme : contrairement à ce qu’affirme Frankfurt, il ne serait alors pas responsable. Le « vrai » responsable dans ce cas, c’est le Dr Black ! Et ce n’est pas parce que le résultat est le même (mort de Mme Jones) que les deux cas se superposent. Ainsi, notre sens commun fait la différence entre le meurtre intentionnel « spontané » et celui qui est conséquence d’une tumeur cérébrale frontale ou d’une schizophrénie, des maladies équivalentes au dispositif du Dr Black. Dans ces cas, Jones peut être tenu pour « responsable » au sens où c’est bien lui qui a tué sa femme (simple notion d’imputabilité), mais ne sera pas retenu comme « coupable » dans une conception matérialiste car pris de folie délirante par exemple, ou sous la dépendance du dispositif du Dr Black (ce qui revient au même) au moment des faits.Une grande partie des confusions de ces discours abscons provient d’une distinction qui n’est généralement pas suffisamment précisée entre responsabilité civile et pénale. Pour faire court, la responsabilité civile - sans infraction pénale - correspond notamment à l’imputabilité (« qui a fait quoi »), avec obligation de réparer les dommages causés intentionnellement ou non. La responsabilité pénale en l’état actuel du droit suppose également l’imputabilité (responsabilité « qui a fait quoi ») qui, si elle est reconnue devient une culpabilité et produit une peine (punition) prévue par les textes de loi réprimant l’infraction pénale (contravention, délit ou crime). Le problème de fond est : est-ce que Mr Jones en tuant spontanément sa femme est « coupable », c’est-à-dire qu’il aurait pu faire autrement, ou bien est-ce que ce sont ses déterminants GES (Génétique / Environnement / Stochastique) - et non un LA ontologique - qui sont aux commandes ?
 
Pour Krankfurt, on peut faire librement ce qu’on est obligé de faire. Étrange. On va certes à la selle "librement" mais on n'est pas libre de ne pas y aller à un moment ou un autre. Idem pour tant de choses dans la vie ; dont la mort.
Plus grave : comment des philosophes « sérieux » ont-ils pu donner crédit à ces fariboles / paraboles criminelles ? Il y a vraiment là un mystère de premier, deuxième, troisième ordre... pour le moins. Parfois, les analyses philosophiques se noient dans des descriptions d’ordres différents façon Frankfurt, des schémas généralement abstrus, de nombreux « cas » qui se veulent démonstratifs avec manipulation si possible (directe ou indirecte), diverses hypothèses fantaisistes... Bref, des générateurs de brouillard avec l’espoir qu’entre le concept X et le concept Y puisse jaillir une petite étincelle de liberté "réelle"  transcendante, à moins que ce ne soit entre le premier et le second ordre, à moins que...

Il faut dire que Frankfurt s’y connaît en baratin depuis qu’il a publié « De l’art de dire des conneries », livre dans lequel il discute de la manière dont les individus pourraient distinguer les « conneries » de la vérité. Conneries qu'il faut distinguer des simples mensonges proférés par des individus qui savent qu'ils mentent, alors que les conneries émanent de gens qui croient en ce qu'ils avancent, qui ne savent pas qu'ils ne savent pas. Il souligne que cette distinction entre vérité et connerie est souvent difficile à faire car les gens ont tendance à croire ce qui confirme leurs préjugés et leurs opinions préexistantes. Autocritique inconsciente de Frankfurt ? 
Le philosophe suggère que la meilleure façon de s'assurer de la véracité d'une information est de la vérifier soi-même en se basant sur des sources fiables et en faisant preuve d’une certaine rigueur intellectuelle. C'est tellement vrai ! 

Soit une belle pétition de principe trop rarement mise en œuvre. En commençant par lui.

[1] En anglais : « the principle of alternative possibilities (PAP) »

[2] « Freedom of the will and the concept of a person » - Journal of Philosophy LXVIII/1 - 1971

[3] On retrouve un peu dans ce désir de second ordre le droit de veto abordé dans les expériences de Libet

[4] Désolé, je n’ai pu résister. Mon désir de premier ordre (jeu de mot facile) l’a emporté sur le désir de second ordre (éviter le ridicule et ne pas compromettre la légitimité du propos). Comme quoi, les désirs de premier ordre peuvent l’emporter, même chez l’animal humain...

[5] Technique dans laquelle l’introduction d’un stimulus influence la façon dont les gens réagissent à un stimulus ultérieur. L’amorçage fonctionne en activant une association ou une représentation en mémoire juste avant l’introduction d’un autre stimulus ou d’une autre tâche.

[6] « Système 1 / système 2 » - 2012 - Flammarion - p. 145 et 253

[7] « Qui a peur du déterminisme ? » 

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Searle, arc en ciel et... libre arbitre

Le philosophe John Searle, un spécialiste de la philosophie de l'esprit ayant étudié le concept de Libre Arbitre toute sa vie, considère que nous en sommes toujours au même point depuis des siècles, sans aucune avancée dans la résolution de ce problème fondamental, et ce contrairement à ce qui s'est passé dans d'autres domaines des neurosciences (conscience, moralité...).


Il constate une incompatibilité, indépassable pour lui, entre :
  • d'une part le déterminisme axiomatique des lois naturelles supportant la science, ce qui interdit toute volonté libre ;
  • d'autre part, la sensation permanente, quotidienne que nous avons de faire des choix "libres", notamment dans le cas de longues délibérations.

Searle critique pourtant le compatibilisme qui soutient que libre arbitre et déterminisme peuvent coexister. Il considère à raison que cette position est une manière d'éviter le problème sans le résoudre. Selon lui, il "pourrait" ou "devrait" y avoir une sorte de "fossé" entre les causes antécédentes et la décision, un espace où nous pouvons participer activement au processus de décision (???). Il semble compter sur l'indétermination quantique pour créer cet espace propre au LA. Cependant, il admet que cela reste difficile à expliquer au niveau neurobiologique. Je confirme : la physique quantique ne peut expliquer la réalité d'un espace de cet ordre du fait notamment de la chaleur du cerveau rendant impossible un effet quantique.

Vidéo sous titrée de Searle :

En conclusion, pour Searle le Libre Arbitre pourrait bien être une illusion - comme l'arc en ciel (qui est une illusion d'optique !) - mais nous ne pourrions pas vivre sans cette illusion. 

Clap de fin ?

Que nenni, car nous connaissons maintenant un peu mieux le circuit cérébral de cette sensation de LA que l'on peut définir par la sensation de volonté d'un côté et le sentiment d'être l'agent de nos actions de l'autre. Ces deux éléments semblent être liés dans le cerveau par une connectome mis en évidence dans une étude de 2018*. Cette étude indique que si nous avons le sentiment d’être libre, c'est grâce à deux réseaux de neurones enfin identifiés. L'un des réseaux nous confère la volonté d'agir, le second nous donne le sentiment d'être l’auteur de nos actes. 

Comment le sait-on ? 

Il se trouve que nombre de découvertes en médecine proviennent d’altérations physiques qui produisent des handicaps précis. Par exemple, une paralysie du bras gauche correspond à des lésions bien identifiées du cerveau droit. Plus surprenant, certains patients victimes de certaines lésions cérébrales deviennent incapables d’une volonté quelle qu’elle soit : c’est ce qu’on appelle le mutisme akinétique. Sans incitation particulière, ces patients ne veulent rien, n'entreprennent rien. Après cartographie du réseau des lésions constatées en imagerie cérébrale chez 28 patients atteints de ce handicap, les auteurs ont mis en évidence un seul et même réseau de neurones centré sur une zone appelée cortex cingulaire antérieur. Ce que Francis Crick, l'un des découvreurs de l'ADN, avait déjà proposé bien avant cette expérience. Ces éléments amènent à penser qu’il existe bien un site neuronal précis qui est siège de ce qu’on appelle la volonté.

D’autres patients font des mouvements mais ne savent pas que ce sont leurs propres mouvements. Ce trouble est appelé « membre étranger »[2]. Cette pathologie empêche les sujets de faire la liaison entre leur acte et leur intention. Leur mouvement leur semble être généré par quelqu'un d'autre qu’eux-mêmes. Dans l’étude citée précédemment, mais cette fois chez cinquante de ces patients souffrant de cette anomalie, on constate que les lésions étaient toutes localisées sur un réseau centré autour d'une certaine région cérébrale, le précunéus[3], lui-même intimement connecté au cortex cingulaire dont je viens de parler concernant la volonté. 

Conclusion des auteurs :

« Collectivement, nos résultats démontrent que les lésions à différents endroits provoquant des troubles de la volonté et de l'agence se localisent dans des réseaux cérébraux uniques, donnant un aperçu du substrat neuroanatomique de la perception du libre arbitre. »

Perception, sensation, et non réalité du LA ! Il y aurait donc bien un substrat neuroanatomique de la « sensation » du Libre Arbitre dans ses deux composants : sensation de volonté et sentiment d’être l’agent qui fait l’action. A ne pas confondre - j’insiste - avec une existence « réelle », ontologique du LA
Si le support de cette sensation est neuronal, cela signifie qu’il obéit nécessairement aux lois régissant tous les neurones, et la matière en général ; bref que tout cela s’inscrit dans la Nature avec ses Lois. 
Il n’existe pas de neurones « libres » ; cela ne veut rien dire pour un neuroscientifique ou un philosophe naturaliste. Même si le neurone était « indéterminé », on ne pourrait pas le qualifier de libre mais plutôt comme ayant un comportement aléatoire, ce qui ne peut en aucun cas fournir un argument en faveur d’un LA « réel » qui serait aussi aléatoire qu’un lancer de dés. 
Donc point de « surplomb » d’un LA « réel » libéré de toute détermination ; reste la sensation qu’il existe et dont on ne peut se passer.

Quel rapport avec l'arc en ciel ?
A moins de fermer les yeux, nous ne pouvons pas éviter de voir un arc en ciel comme s'il existait "vraiment" et à vrai dire, illusion ou non, c'est beau ; mais surtout, il n'a aucune incidence sur nos vies (bien qu'à une époque, le montrer du doigt portait malheur !). 
En revanche, si l'on considère la sensation de Libre Arbitre comme une "réalité", les conséquences pour la vie humaine sont "déterminantes" puisque le méchant est donc complètement libre de ses choix, pouvait faire autrement que mal, mérite donc la punition... soit la déclinaison des passions tristes (Spinoza) : haine, punition, vengeance, violence, culpabilité, remords et regrets, envie, honte, mépris...

Un mot concernant le "désespoir" de Searle du fait de la non résolution philosophique / scientifique du "problème" central et ancestral du Libre Arbitre en nous intéressant aux fragrances de l'éther.

A ne pas confondre avec l’Ether de la mythologie grecque (divinité primaire) ou même le composé organique à l’odeur caractéristique, l’éther -  dans le contexte de la physique classique -, était supposé être un milieu mécanique invisible et omniprésent, remplissant tout l’espace. Il était considéré comme le support nécessaire pour la propagation de la lumière et des ondes électromagnétiques. Cette "hypothèse éthérée" était cruciale pour plusieurs raisons :

  • Afin d'expliquer la propagation de la lumière, les scientifiques pensaient que, comme les ondes sonores nécessitent un milieu (comme l’air), les ondes lumineuses devaient également se propager à travers un certain médium. L’éther luminifère était donc proposé comme ce médium nécessaire pour expliquer comment la lumière pouvait voyager à travers le vide de l’espace ;
  • Les équations de Maxwell, unifiant l’électricité et le magnétisme, semblaient indiquer l’existence d’un milieu pour la propagation des ondes électromagnétiques : l’éther était à nouveau envisagé comme le milieu permettant de relier les phénomènes électriques et magnétiques ;
  • Cerise sur le gâteau, l’éther fournissait un cadre de référence absolu pour mesurer le mouvement, ce qui était en accord avec les idées de la physique classique, où l’espace et le temps étaient considérés comme absolus.

Patatras.

L’hypothèse de l’éther a du être abandonnée pour plusieurs raisons dont l’expérience de Michelson-Morley (1887 : la vitesse de la lumière est  constante, indépendamment du mouvement de la Terre), la relativité restreinte (1905 : les lois de la physique sont les mêmes pour tous les observateurs, et la vitesse de la lumière est constante dans tous les référentiels) et enfin la théorie quantique des champs montrant que le vide n’est pas vide (!) mais rempli de fluctuations quantiques. La compréhension moderne de l’espace et du temps, ainsi que des champs quantiques, a remplacé le besoin de ce concept. 

Envolé cet éther très volatil !

L’existence de l’éther en physique n’a jamais pu être prouvé pour la simple raison qu’il n’existe pas... et qu’il est pratiquement impossible de prouver que quelque chose n’existe pas  (pouvez-vous prouver que le Père Noël, le Yéti, les dieux, Satan, le paradis et l'enfer, la pierre philosophale... n’existent pas ?). 

Searle a effectivement des raisons de désespérer si le but est de prouver l'existence de l'inexistant.

Ether et Libre Arbitre ontologique n’existent pas, et nous n’avons aucun besoin de ces entités hypothétiques pour expliquer le monde. 

Quand à ceux qui croient encore que le LA existe - tel un Deus ex machina descendant des cintres -, la charge de la preuve est, encore et toujours, sur leurs épaules.


* « Lesion network localization of free will » - 2018 - https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6196503/

[2] Ce syndrome est causé par des lésions du corps calleux, impliquant également le lobe frontal mésial, certaines variantes du syndrome étant dues à des lésions du lobe pariétal

[3] Selon une étude, le “soi” (le “je”) - soit « la conscience d’habiter son corps » - se situe dans la zone du précunéus antérieur. Par ailleurs, les sensations du « moi » et du « je » seraient situés dans des réseaux différents du cerveau. Ces découvertes pourraient déboucher notamment sur des traitements pour les patients dépressifs => « Causal evidence for the processing of bodily self in the anterior précunéus » - 2023 -https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37295420/

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Rapport XZTF22

La science nous émerveille tous les jours. 

Nous avons la preuve de l'existence d'une vie extraterrestre intelligente grâce à la traduction par IA d'un "rapport" provenant de Kepler-438 b.

Voici le résumé :

"Nous avons visité BT-2895 durant 128 unités-temps. Nous avons commencé par vérifier que les lois cosmiques étaient bien les mêmes que partout ailleurs dans l'univers connu : c'est bien le cas sur cette planète que ses habitants appellent "Terre". 
Les formes vivantes les plus évoluées s'appellent eux-mêmes des "Hommes" bien qu'ils admettent que leur espèce comporte une moitié de "femmes" qui sont les reproductrices de l'espèce. Nous appellerons cette espèce les "humains" dans la suite de ce rapport. 
Les autres formes de vie sont assez proches de celles que nous avons connues il y a 2,6 milliards unités-temps.


Quelques points remarquables :

  • Les humains ont en grande partie utilisé les ressources de leur planète au point de modifier le climat du fait notamment de la pollution engendrée : une lutte a commencé entre - selon leur formulation imagée - les partisans de la préservation de "la fin du mois" contre ceux qui veulent éviter "la fin des temps". Il semble que la majorité veuille préserver les deux options à la fois, soit la contradiction que nous avons bien connue nous-mêmes et qui nous a mené à la "grande mutation" après extinction de la biodiversité ;
  • Les humains ont divisé leur planète en de nombreuses "régions" appelées “pays”, chacune avec ses propres lois et cultures. Ils semblent très attachés à ces divisions et peuvent même entrer en conflit pour les défendre, voire envahir leur voisin dans le cadre d'une prédation toujours très présente et, bien qu'elles aient tendance à diminuer depuis quelques unités-temps, les guerres sont toujours présentes. Les formes primitives de spiritualisme qu'ils appellent "religions" sont en concurrence permanente pour l'hégémonie des unes sur les autres et le poison de la domination semble toujours infuser largement dans tous les rapports du vivant sur cette planète ;
  • La très grande majorité des humains est persuadée d'être d'une essence particulière échappant aux lois cosmiques, avec des concepts comme ce qu'ils appellent l'âme, le libre arbitre, la conscience... qui sont pour eux d'un autre ordre que de simples émergences de la matière. En résumé, ils n'acceptent pas d'être des êtres biologiques possédant certaines facultés de haut degré (créativité, langage, cognition) mais préfèrent se donner  un statut de nature "supérieure". Cette croyance, pourtant dénoncée par nombre de leurs scientifiques et philosophes, leur semble suffisante pour légitimer assassinats, domination et punitions diverses ;
  • Les hommes (mâles de l'espèce) ayant des attributs sexuels externes s'occupent des choses extérieures (chasse, guerres...), alors que les femmes (femelles de l'espèce) ayant des attributs sexuels internes sont censée s'occuper du foyer. Cette répartition anciennes des taches est remise en cause depuis quelques unités temps par les femmes, ce qui ne plait pas à certains hommes qui ne veulent pas perdre leur position dominante et sont qualifiés de "masculinistes toxiques"*. Décidément, on retrouve toujours les mêmes sujets de discorde d'une planète à l'autre. 
Nous savons bien que le Haut Conseil des Planètes a interdit toute interférence avec les formes de vie des mondes visités, mais nous pensons qu'il faut envisager ici une exception du fait des risques de déflagration possible sur cette "Terre" où les belligérants possèdent un arsenal d'armes - certes rudimentaires (fission atomique) - mais susceptibles de faire disparaître toute forme de vie sur cette belle planète bleue.

C'est tout l'objet de ce rapport, sachant que l'apocalypse (terme qu'ils utilisent dans leurs textes sacrés primitifs), qu'elle soit climatique et/ou atomique, est prévisible selon l'oracle ORDIQUANTA."

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